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CHAPITRE 5

L’enveloppe gazeuse de la Terre

le couple atmosphère – hydrosphère

Structure thermique et chimique verticale de l'atmosphère

 

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cours (ppt)

 

 

B - Structure thermique et chimique verticale de l'atmosphère

 

 

- 1 - La Troposphère

a - Troposphère et phénomènes climatiques

Son épaisseur varie de 8 Km au pôle en hiver (air froid et dense) à 16 km à l’équateur (air chaud et léger); elle contient 75% de la masse de l’atmosphère et quasi 100% de la vapeur d’eau. Tropos veut dire changement; la troposphère est le siège des phénomènes météorologiques. Elle constitue la zone convective de l'atmosphère.

La température au sol est en moyenne de +13°C. En un point donné, elle est liée à l’ensoleillement et à la quantité d'IR réémis par la Terre.

Anaxagore, au V° siècle A.C., reprenant les écrits de Thalès de Milet, remarquait déjà que l’air chaud s’élève, que les nuages se forment lorsque l’air refroidit. Il admettait ainsi que la température s’abaisse avec l’altitude. L’air chaud s’élève en premier lieu par décompression adiabatique. La convection continue aussi longtemps que les particules montantes sont plus chaudes que l’air environnant. Lorsque la température a suffisamment baissé, la condensation de la vapeur d’eau commence, et la chaleur latente libérée relance la machine, accélérant ainsi l’ascension de l’air.

Au sommet de la stratosphère la température cesse de décroître (tropopause) et se stabilise autour de -50 à -80°C. Le gradient moyen de température est de l’ordre de -6°.Km-1. La tropopause peut être mise en évidence lors du développement de très gros nuages d’orages dont l’ascension vient “ buter ” sur cette couche limite; ces nuages constituent alors une magnifique enclume.

 

b - Troposphère, siège de l’effet de serre.

 

Le terme “ serre ” n’a pas été judicieusement choisi, car dans une serre, la paroi de verre joue un rôle primordial en interdisant le transfert de chaleur vers l’extérieur (les IR), mais pas le passage des longueurs d’ondes visibles. La chaleur accumulée dans la serre résulte donc essentiellement du fait que les IR émis par le sol ou les plantes sont réfléchis par le verre, alors que l’insolation directe traverse normalement les parois de la serre. L’atmosphère terrestre, elle, n’a pas de couvercle, et le mécanisme de l’effet de serre est un peu différent.

Le bilan énergétique de l’atmosphère repose sur deux paramètres fondamentaux, sa composition (nous y reviendrons) et la distance du soleil.

En effet, les planètes du système solaire étant en équilibre thermodynamique (leur température moyenne annuelle est “ constante ”), les lois du rayonnement du corps noir, établies à la fin du XIX°, leur sont applicables, comme elles le sont au soleil :

Zone de Texte: Fig. 3 : a) Spectre solaire comparé à l’émission d’un 		b) Spectre du corps noir à 256°K, 
corps noir à 5770°K (en jaune), T° de la chromosphère		T° d’émission de la Terre
     
Le spectre réel (courbe noire) montre des creux profonds,
Liés aux absorptions élémentaires de son atmosphère 	     Les longueurs d’onde du visible sont hors du champ 
A 5770°K, Il émet principalement dans le visible		    d’émission de la Terre qui, à 256°K n’émet que des IR
0.4 à 0.7 mm et l’IR▼				dans la gamme 3  à 20 mm ▼
                  
                                                                                      Zone de Texte: Fig 4 : Relation couleur-température du corps noir, d’après J.Y. Daniel 1991
Rayonnement à 2°K, fossile du Big Bang.
Etoiles : Betelgeuse, rouge ; Soleil, Jaune.
Cyg X1 Rayonnement X de la constellation du Cygne, trou noir potentiel.

1 -     la loi de Planck : elle exprime le fait que l’intensité du rayonnement émis par le corps en équilibre en fonction de sa longueur d’onde passe par un maximum (fig. 3a cas du Soleil, 3b cas de la Terre);

2 -     la loi de Wien : elle exprime le fait que la longueur d’onde maximale émise par le corps noir est inversement proportionnelle à sa température d’émission;           

λmoy = 2900/T,

 

λ exprimé en microns et exprimé en °K. Autrement dit, plus un corps est chaud plus la fréquence de sa couleur démission est élevée (Fig. 3a-b, Soleil et Terre ; Fig. 4, principaux objets cosmiques). En effet, plus la fréquence d’une radiation est élevée, plus son énergie est importante.

3 -     La loi de Stephan-Boltzman nous dit que pour un corps noir de rayon R, la luminosité L (voir définition Chp. 1A), à la température T est égale à 

L = 4πR2 . s T4    avec

la cte de Stephan s = 5.67 10-8 SI (erg.s-1.cm-2/K-4). Pour le Soleil, R = 700 000 Km, T°surface= 5770°K,

la luminosité Ls = 3.8 1026 w m‑2.

On appelle “ Constante solaire ” le flux solaire Cs reçu par une surface plane située à la distance d du Soleil,

Cs = Ls/(4πd2).

Cette constante solaire n’est d'ailleurs pas strictement constante. Les mesures montrent des variations de l’ordre de 0.1% en relation avec la surface cumulée des taches solaires.

Pour la Terre, située 150 106 Km, Le flux solaire calculé est de 1360 w m-2. Puisque l’on considère les planètes comme des corps noirs sphériques à l’équilibre, l’énergie qu’elles émettent est égale à celle qu’elles reçoivent : pour une planète de rayon Rp, située à la distance d du soleil, la température d’équilibre sera Tp et le bilan s’écrit :

Cs = Ls/(4πd2).

 (NB. Surface réceptrice = jour = πRp2 ; surface rayonnante = 4πRp2). Le flux solaire reçu par la Terre (par unité de surface) est donc égal à Cs/4 — soit 340 w m-2 en moyenne Cela représente environ 10 000 fois la chaleur dissipée par les enveloppes rocheuses par unité de surface! — et le flux rayonné par la Terre à la température TT , appelé émittance (voir définition Chp. 1A), est de la forme

σ TT4

L’atmosphère et la surface terrestre réfléchissent vers l’espace respectivement 87 W.m-2 et 21 W.m-2 =108 W.m-2 soit 31% de l’énergie reçue (Fig. 6). Cette fraction de l’énergie renvoyée vers l’extérieur définit l’albédo α de la planète (=0.3) [1],. Les meilleurs réflecteurs sont les corps blancs ou clairs, les nuages, la neige et la plupart des sols dépourvus de végétation. On perçoit ici l’effet rétroactif d’un changement climatique éventuel (variation de la surface réfléchissante des calottes glaciaires) ou de la déforestation.

Connaissant l’albédo de la Terre (α), on peut en déduire que la valeur du flux qu’elle reçoit réellement vaut

Cs/4 (1 – α) = 340 *0.7 = 238 w m-2

 

et le bilan radiatif de la Terre s’écrit schématiquement :

Flux reçu     Cs/4 (1 – α) = s.T4     Flux émis

TT= [(238/ s]-4= [(238/ 5.67 ]-4 102 =254.7°K

 soit -18.3°C.

A cette T° d’équilibre, la Terre émet essentiellement dans le domaine des IR, en 5 et 50 mm (Fig. 3b)

La différence entre sa température d’équilibre théorique (-18°c) et sa température moyenne (+13°c) impose que la Terre tire de l'énergie d’une autre source. L’énergie interne dissipée par la Terre (Chp. 1) est très insuffisante pour justifier une telle différence, la source d’énergie réside donc nécessairement dans son atmosphère. Il convient toutefois de rester prudent, pour plusieurs raisons :

Le calcul de la température d’équilibre présenté ici est un modèle largement utilisé quoique très simplifié. Nous avons raisonné à partir d’un flux que recevrait un disque perpendiculaire au flux, et non une demi-sphère exposée au flux. La quantité totale reçue calculée est donc bien satisfaisante, mais ensuite nous calculons une température moyenne comme la racine (quatrième !) de ce flux moyen, alors qu’il serait plus rigoureux de sommer les températures calculées en chaque point de la demi-sphère exposée, en fonction du flux réel reçu par chaque surface unitaire non perpendiculaire au flux sauf sur le plan de l’écliptique. Par ailleurs, il n’est pas tenu compte de la rotation terrestre, ni de l’inclinaison de son axe et de l’excentricité de la révolution terrestre. En résumé, notons que cette valeur de -18°C n’est pas exacte mais qu’elle suffit à notre propos.

Nous avons vu qu’une partie du rayonnement est directement réfléchie par le globe terrestre (albédo) et que ce phénomène est compliqué par des absorptions dans l’atmosphère (note infrapaginale page précédente). Les absorptions de rayonnement sont principalement le fait des molécules qui constituent l’atmosphère. L'absorption du rayonnement provoque la transition d'un atome ou d'une molécule d'un état d'énergie stable vers un état d'énergie plus élevé (excité) sous l'action d'un photon incident d'énergie hn. Pour que l'absorption ait lieu il faut donc que le quantum d'énergie hn corresponde à la différence entre deux niveaux permis par les règles de la mécanique quantique: c'est ce que l'on appelle une raie d'absorption (Fig. 5). En revenant à son niveau d'énergie initial, soit directement, soit par étapes, la matière émettra à son tour un rayonnement de même énergie. Les principaux absorbants qui jouent un rôle dans l'énergétique de l'atmosphère sont des molécules gazeuses triatomiques: vapeur d'eau (H2O), dioxyde de carbone (CO2), ozone (O3).Ces molécules ont un spectre énergétique beaucoup plus riche que celui des molécules diatomiques (O2, N2, H2) qui absorbent peu le rayonnement solaire ou terrestre. En outre, les molécules poly atomiques (CH4, CFC) ont un pouvoir absorbant très élevé : on appelle « gaz à effet de serre » les gaz fortement absorbants

Le spectre du rayonnement solaire est caractérisé par des longueurs d’ondes courtes, dans la gamme 0.1 à 5 mm couvrant le domaine des UV, du visible et un peu les IR ; l’essentiel du rayonnement est compris en 0.3 et 1.5mm (Fig. 3a). Dans ce domaine de longueurs d’onde, il n’y a pas d’autres raies d’absorption de gaz atmosphériques autres que  celles de l’eau, tant dans la basse atmosphère (troposphère) qu’en altitude (fig. 5). Il s’ensuit donc une absorption minimale du flux solaire, et ces absorptions ne sont pas totales. Dans le domaine 1.5-5mm Le CO2 et le méthane sont présents, mais dans un domaine de très faible intensité du flux solaire. Par contre, dans la bande spectrale de l’émission du corps noir terrestre, 5-50mm, le nombre des raies des gaz atmosphériques est beaucoup plus important, et leur capacité d’absorption devient très importante, en particulier dans les couches basses et denses de l’atmosphère (Fig. 5)où seules trois bandes d’énergies ne sont pas totalement absorbées, ouvrant autant de fenêtres vers le cosmos :

1 -     8-9 mm;

2 -     10-14 mm;

3 -     18-30 mm.

Plusieurs faits importants sont à noter:

1 -     Dans le domaine de l'émission terrestre(5-50 mm; Fig. 3b), les fréquences absorbées par H2O (en bleu pâle) le sont à 100%; une augmentation de la teneur en eau de l'atmosphère serait donc sans répercutions sur l'effet de serre. En outre l'atmosphère terrestre est globalement proche de la saturation en H2O. Il n’y a pas grand chose à redouter d’une augmentation de la teneur en eau.

2 -     Le CO2 (en violet) peut par contre absorber encore une part importante du rayonnement IR dans la fenêtre 12-16 mm, dans la troposphère en particulier. Une augmentation de la teneur dans l'atmosphère se traduit donc automatiquement par un accroissement de l'effet de serre. La concentration en CO2 étant naturellement très basse, l’activité humaine (CO2 d’origine industrielle, de chauffage, transport) modifie significativement sa teneur et provoque nécessairement un accroissement de l’effet de serre. Pour l’essentiel de la communauté scientifique, les effets du CO2 anthropique ne sont maintenant considérés comme indiscutables, même s’il existe encore ici ou là quelques chercheurs arcboutés sur des faits scientifiques et leurs observations, rebelles face à ce consensus, nous y reviendrons.

3 -     Le CH4 (en vert) peut lui aussi absorber une part importante du rayonnement IR dans la fenêtre 8-10 mm. Le méthane est un produit qui provient naturellement de la décomposition de matières organiques dans des conditions réductrices (c'est le gaz des marais et des terrains humides 1.5 à 3 G.Tonnes/an). Il voit sa concentration augmenter fortement avec l'accroissement des surfaces consacrées à la riziculture (actuellement 2 à 3.5 G.T/an), et aussi (même si ceci peut apparaître plus anecdotique) avec l'augmentation du cheptel ruminant, dont la fermentation entérique est un producteur important de CH4 (1G.T/an!). Son effet ne peut donc que se surajouter à celui du CO2

4 -     L’O3 troposphérique (en jaune) pose un problème comparable à celui de l’eau, la bande 10-12mm étant d’ores et déjà presque totalement absorbée. D'origine anthropique elle aussi, l’ozone troposphérique reste limitée aux bassins industriels et aux mégalopoles. Il en résulte une augmentation locale de la température, mais qui restera faible. Son inconvénient majeur n’est donc pas un accroissement important de l’effet de serre il mais réside dans son impact sur la santé humaine, en raison de l’irritation des voies respiratoires qu’elle provoque.

C’est donc une fraction importante de l’énergie émise par le corps noir terrestre qui est ainsi absorbée par l’atmosphère et rétrocédée avec retard au cosmos. Il s’ensuit une élévation de la température de –18°C à +13°C : c'est ce que l'on nomme «effet de serre», et les gaz responsables sont appelés « gaz à effet de serre »

Reprenons en détail le schéma de bilan énergétique terrestre de Ramanathan et al. (Fig. 6).

Zone de Texte: Fig. 6: L’effet de serre, D‘après Ramanathan et al

Sur les 345 Wm-2 reçus par la Terre dans les UV, le visible et le proche IR, ce sont finalement 169 W.m-2 seulement qui sont absorbés par la surface du sol :

1 -   68 W.m-2      sont absorbés par l’atmosphère ;

2 -   87 W.m-2      sont immédiatement réfléchis vers le cosmos ;

3 -   21 W.m-2      sont directement renvoyés au cosmos par le sol terrestre

La mesure du rayonnement IR émis par la surface terrestre est de 390 W.m-2 (en rouge), avec parmi eux :

1 -   20 W.m-2          perdus directement dans le cosmos,

2 -   217 W.m-2     (237 reçus –20 car il y a équilibre du bilan) réémis secondairement mais d’abord absorbés dans l'atmosphère par les gaz à effet de serre .

Si l’on considère simplement les flux entrant (solaire) et sortant (terrestre =390 W m-2) l'atmosphère absorbe donc au total:

1 -   438 W m-2    (68 W.m-2 du flux solaire + 370 W.m-2 du flux terrestre).

2 -   90 W m-2          de flux emportant la chaleur latente

3 -   16 W m-2      de chaleur sensible de la surface à l’atmosphère.

En effet, Les changements d’état de l’eau dans le champ de gravité jouent un rôle prépondérant dans le transfert de chaleur entre la surface terrestre et l’atmosphère. L’interface entre les 2 milieux constitue une couche limite qui ne peut donc être franchie par convection. La géosphère réémet l’énergie reçue vers l’atmosphère par rayonnement ou conduction. L’évaporation de l’eau contenue dans le sol permet alors de transférer un excédent de chaleur de la surface terrestre (géosphère ou hydrosphère) vers l’atmosphère, et inversement, la condensation ou la congélation (plus la gravité ici aussi), sont le moteur du transfert de chaleur de l’atmosphère vers la surface. Les flux de chaleur latente sont particulièrement forts au-dessus des courants marins chauds comme le Gulf Stream et au-dessus des forêts tropicales humides, couplant les cycles d’énergie et d’eau. Les flux de chaleur sensible sont importants au-dessus de terres arides.

C'est donc un total de 438 +90 +16 = 544 W m-2

qui est cédé à l'atmosphère ; or les mesures du flux sortant vers le cosmos nous indiquent que 217 W m-2 seulement partent dans le cosmos.

L'excédent est égal à, 544 -217 = 327 W m-2,

redistribués sous forme d'effet de serre.

Les gaz et aérosols à effet de serre jouent donc un rôle primordial dans le climat terrestre tant qu’ils ne saturent pas la fenêtre d’énergie qu’ils occupent.

 

 

c – Réchauffement climatique ou « global warming »

On comprend ainsi que, parmi les gaz à effet de serre,  les climatologues recherchent les responsables du changement climatique observé de nos jours, en suspectant particulièrement le CO2. Si les autres gaz sont beaucoup moins abondants, leur rôle peut aussi être primordial en raison de le fort pouvoir de réchauffement (tableau 2)

Zone de Texte: Tableau 2 : Potentiel de réchauffement planétaire (PRP) et durée de vie dans l'atmosphère des gaz à effet de serre (GES) 
http://www.ec.gc.ca/pdb/ghg/inventory_report/2003_report/c1_f.cfm
http://www.riaed.net/spip.php?article448
GES	Formule 	PRP 	Durée de vie
dans l'atmosphère	
  Dioxyde de carbone	CO2	1	Variable 50-200
  Vapeur d’eau	H2O	8	1 semaine
  Méthane	CH4	21	12 ± 3
  Oxyde nitreux	N2O	310	120
  Hydro fluorocarbures (HFC) 
HFC-23 	CHF3	11 700	264
HFC-32 	CH2F2	650	6
HFC-41	CH3F	150	4
HFC-43-10mee 	C5H2F10	1 300	17
HFC-125 	C2HF5	2 800	33
HFC-134 	C2H2F4 	1 000	11
HFC-134a 	C2H2F4	1 300	15
HFC-143 	C2H3F3 	300	2
HFC-143a 	C2H3F3 	3 800	4
HFC-152a 	C2H4F2 	140	48
HFC-227ea 	C3HF7	2 900	37
HFC-236fa 	C3H2F6	6 300	209
HFC-245ca	C3H3F5	560	7
  Hydrocarbures perfluorés (HPF) 
Perfluorométhane	CF4	6 500	50 000
Perfluoroéthane	C2F6	9 200	10 000
Perfluoropropane	C3F8	7 000	2 600
Perfluorobutane	C4F10	7 000	2 600
Perfluorocyclobutane	c-C4F8	8 700	3 200
Perfluoropentane	C5F12	7 500	4 100
Perfluorohexane	C6F14	7 400	3 200

Le fait que la corrélation entre la température moyenne et la concentration en CO2 soit globalement forte est considéré comme la preuve que le CO2 anthropique est la cause principale de l’augmentation de la température terrestre. Les paléoclimatologues ont montré que des évolutions climatiques majeures se sont produites bien avant l'ère industrielle. Les courbes d’évolution de J.R. Petit et al. 1999 (Fig. 7) sont caractéristiques ; le climat terrestre apparaît cyclique à l’échelle de la centaine de millier d’années (cf. § F4b, ce chapitre).

Zone de Texte: Fig. 7 : évolution de la teneur en CO2 et de la Température de l'air depuis 400 000 ans; les mesures ont été effectuées dans une carotte de glace de l'antarctique (Vostok)
 

On observera tout d’abord dans la figure 7 que la corrélation température CO2 est loin d’être parfaite. De plus la covariation de deux paramètres n’implique pas un lien d’interdépendance ; ils peuvent en effet dépendre chacun d’un troisième facteur. On notera ensuite, et cela est essentiel, que ces covariations ne sont pas synchrones. Les variations de teneur en CO2 suivent les variations de la température avec un décalage à peu près constant de quelques centaines d’années (moins de 1000 ans ; Nicolas Caillon et al 2003). Ce phénomène n’est pas observable à l’échelle de la figure 7).Lors de ces variations historiques, la teneur en CO2 de l’atmosphère est donc le corollaire de l’augmentation de la température et non l’inverse, mais cela ne signifie pas que cet inverse soit impossible. Un tel diachronisme existe aussi pour le méthane (CH4), qui est attribué à la fonte du permafrost à la fin des périodes froides. Le sol gelé des hautes latitudes de Sibérie et d’Alaska contiendrait une fraction importante (30% ou plus ?) de tout le carbone stocké dans les sols de la planète. La fonte du pergélisol (autre nom du permafrost) pourrait être suivie d’émissions à grande échelle de méthane ou de dioxyde de carbone. Dans les scénarios plus ou moins catastrophiques que l’on nous promet, de telles émissions pourraient être supérieures à celles produites par les carburants fossiles.

Les différences essentielles qui accompagnent l’évolution de l’atmosphère actuelle par rapport à celle de l’atmosphère ancienne résident donc d’abord dans le fait que l’augmentation de la T° suit celle de la concentration en gaz à effet de serre et que celle-ci apparaît extrêmement rapide. Elles résident ensuite dans l’amplitude des variations ; d’après les mesures effectuées dans les glaces de l’Antarctique et du Groenland, on dit souvent que les valeurs maximales « naturelles » de CO2 n’avaient jamais dépassé 300-320 ppmv (Fig. 7), valeur que nous avons atteinte en 1900 sur la courbe de la figure 11 et que nous avons largement dépassées depuis. D’après de nombreux auteurs, la concentration actuelle en CO2 dans l’atmosphère est de 370-380 ppmv (Fig. 8a).

Dire que cette valeur n’a jamais été dépassée est néanmoins inexact :

1 -   Concernant la période industrielle, nombre de voix discordantes se font entendre ; prenons pour exemple  E.G. Beck, 2007 (cf. fig. 11), qui considère que les courbes d’évolution du CO2 atmosphérique sont insuffisamment renseignées et qu’il faut prendre en compte l’ensemble des données historiques fiables, nous y reviendrons.

2 -   Concernant toute l’histoire de la Terre, depuis  l’explosion de la vie (600 Ma., début du Primaire) jusqu’à la deuxième partie du tertiaire, les paléoclimatologues ont montré que l’atmosphère terrestre a connu les teneurs en CO2 beaucoup plus élevées que de nos jours (Fig. 8b) qui apparaissent difficilement corrélables aux températures et aux niveaux des océans.

Zone de Texte: Fig. 8a : variation de la teneur en CO2 pour les 20 000 ans BP, d’après le rapport du GIEC 2007
 
   Zone de Texte: Fig.8b : RCO2 = Rapport des teneurs de CO2 avec le niveau de concentration de1900

Zone de Texte: Fig. 9 : Température de l’Océan et Concentration en CO2 dans l’atmosphère depuis 65 Ma, in IPCC AR4 Chp 6, Fig. 6.1
 
Prenons l’exemple des derniers 100 Ma. Le climat terrestre a considérablement changé, passant d’une période chaude (jusqu’à la fin du Paléocène et sans incidence notable de l’accident à 65Ma responsable de la crise du vivant entre crétacé et Tertiaire) à une période marquée par les l’existence de calottes polaires (Fig. 9). D’abord douce durant l’Oligocène, la transition devient abrupte à 33.7 Ma. Elle est appelée « Eocène-Oligocène Boundary (EOB) et s’accompagne globalement d’une diminution très importante de la concentration atmosphérique en CO2, mais sans corrélation évidente à l’échelle de temps de quelques Ma.

Dans les figures 7 et 9, la température n’est pas mesurée directement mais monitorée par un proxi, classiquement par le rapport 18O/16O (d18O). Lorsqu’il s’agit de mesures dans les glaces (Fig. 7) le fonctionnement en est le suivant. Nous avons vu (Chp. 2.C.2) que le rapport 18O/16O est fractionné significativement lors de l'évaporation et de la précipitation; l’isotope léger étant favorisé dans l’état gazeux. L'eau du réservoir atmosphérique se trouve ainsi déprimée en isotopes lourds 18O et D (d18O et dD <0, Fig. 10a) par rapport à l'eau du réservoir océanique, et l'eau de pluie (ou la neige) est enrichie en isotopes lourds par rapport à l'eau atmosphérique. Avec le transport de l'air à travers les cellules convectives (Hadley, Ferrel, et cellule polaire, cf. § 5.D) et les précipitations successives qu'il peut subir pendant son transport, l’air évaporé sous les basses latitudes voit ainsi son rapport 18O/16O décroître en remontant vers le nord (Fig. 10b). Vient s’ajouter l’effet de la température de l’atmosphère, qui exerce un contrôle très fort sur la composition isotopique de l’eau de pluie. Avec l’augmentation de la température, les précipitations s’enrichissent linéairement (0.5‰ par C° pour d18O) en isotopes lourds 18O et 2H (D) par rapport aux léger 16O et 1H (Fig. 10c). Lorsqu’il atteint une latitude suffisamment haute, cet air précipite finalement en neige et constitue un réservoir solide (apparenté à la géosphère) aux propriétés isotopiques très différentes de celles de l'océan au dessus duquel il s’était évaporé. Durant les périodes glaciaires, le stockage d'un énorme volume de glace provoque en corollaire un enrichissement de l'eau océanique en 18O par rapport à 16O. Inversement pendant les périodes chaudes, il s'opère un déstockage de 16O.

Dans le cas de mesures faites à partir de sédiments, le proxi d18O utilisé est celui de la mesure sur des coquilles fossilisées. Les organismes tirant leur coquille du réservoir océanique, on considère qu’il s’agit d’un processus de fractionnement d’équilibre chimique (cf. Chp. 2.C.2.a). La valeur recherchée étant celle de la température de surface de la mer à l’époque de la construction de ces coquilles, on utilise surtout les espèces planctoniques pélagiques (vivant à la surface loin des côtes) et on élimine les espèces benthiques (vivant sur le fond) qui donneraient la température du fond de l’océan au moment considéré.

 

Zone de Texte: Fig. 10a : Effet des precipitation sur les valeurs de d2H et d18O (based on Hoefs 1997 and Coplen et al. 2000)
 
http://www.sahra.arizona.edu/programs/isotopes/oxygen.html
   Zone de Texte: Fig. 10b : carte des dD et d18O pour les précipitations en Amérique du Nord ; observer la distillation isotopique SE - NW depuis le golfe du Mexique, précipitations qui couvrent l’essentiel du territoire contrairement aux pluies du Pacifique
 
in Géologie isotopique 2005
 

Zone de Texte: Fig. 10c : (Clark and Fritz 1997, p. 37, as compiled in Rozanski et al. 1993, modified by permission of American Geophysical Union).
 
Variation du d18O d’une pluie subissant une distillation de Rayleigh. Conditions initiales : eau vapeur est 
d18Ovapor = -11‰,  T° = 25°C. Température finale -30°C. 
à 0°C, le fractionement neige- eau vapeur remplace le fractionnement liquide-vapeur. 
Les lignes pointillées relient d18O de précipitation et température de condensation. 
 
http://www.sahra.arizona.edu/programs/isotopes/oxygen.html
Revenant à la figure 7, qui analyse les fluctuations pré-humaine du CO2 et de la température. On note qu’à une amplitude de variation thermique de 10°C correspond une variation de la concentration en CO2 de 100 ppmv. Cette amplitude de la variation de température en fonction de celle du CO2 est dont très au-delà de l’actuelle, dont le rapport du GIEC estime que pour le XX° siècle elle est de +0.6°C pour un accroissement en CO2 du même ordre de grandeur, 100 ppmv. Force est donc de constater que la réponse du climat actuel à notre injection massive de gaz à effet de serre durant le XX° siècle est considérablement plus faible que ce que les archives des glaces polaires ont enregistré. La cause ne peut en être le temps d’homogénéisation de l’atmosphère, très inférieur temps d’injection, plus d’un siècle. L’écart à la linéarité entre ces 2 paramètres est-il si important qu’il signifie que l’on va vers une asymptote de température? Pour quelle raison? La figure 5 suggère que, dans la gamme des longueurs d’ondes émises par la Terre, les raies d’absorption du CO2 ne sont pas complètement « bouchées » mais que l’on s’en approche… Est-ce suffisant ?

Le climat terrestre change, il convient d’essayer d’évaluer la part humaine dans ce « dérèglement ». Nous comparerons donc les courbes de l’évolution récente de la température de notre atmosphère avec celle de trois paramètres essentiels (Fig. 11) :

1 -la concentration de l’atmosphère en gaz à effet de serre, CH4, CO2, SO2 et N2O ;

2 -l’émission du CO2 liée la consommation des énergies fossiles, ou bien (très similaire) la production des combustibles fossiles, depuis le début du XVIII°.

3 -l’activité de notre étoile, dont nous savons qu’elle procure l’essentiel de l’énergie disponible dans notre atmosphère ; si les conditions de distance au Soleil et de luminance de celui-ci sont les facteurs clef qui ont permis l’apparition de la vie sur Terre on peut supposer que des fluctuations, mêmes mineures, de ces paramètres peuvent influer sur le climat.

Considérons tout d’abord le gaz à effet de serre principal, le CO2. Avant 1850, la courbe de concentration montre une augmentation lente et régulière, probablement liée à l’accroissement régulier de la biomasse cultivée. A cette date, on observe une première rupture de pente dans la courbe, qui montre clairement que la teneur en CO2 dans l’atmosphère augmente immédiatement avec le décollage de la production de charbon. La seconde rupture de pente se produit un peu avant 1960, et correspond à l’explosion de la consommation de pétrole et de gaz. L’accroissement de la consommation de charbon reste quant-à lui à peu près linéaire depuis le creux de la fin de la 2° guerre. La corrélation positive entre la concentration en CO2 atmosphérique et dilapidation des ressources fossiles apparaît donc clairement établie et non équivoque. Elle revient à dire en corollaire que l’influence des phénomènes volcaniques sur la concentration du CO2 atmosphérique est non observable, probablement masquée par note activité.

L’évolution de la courbe du méthane est significativement différente de celle du CO2. Comme le montre la figure 11, la forme de cette courbe est très proche de celle de l’évolution de la population mondiale pour la même période. L’accroissement de la teneur en CH4 observable à partir du début du XX° siècle est donc essentiellement lié à l’augmentation de la consommation de biomasse méthanogène, le riz en particulier, sans omettre l’élevage bovin souvent mis en cause. Plus en détail, le GIEC (2007) rapporte  que La concentration atmosphérique mondiale de CH4 est passée d’environ 715 ppb à l’époque préindustrielle à 1 732 ppb au début des années 1990, pour atteindre 1 774 ppb en 2005 (équivalent à 35-40 ppm de CO2, cf. tableau2). Le taux de croissance a fléchi depuis le début des années 1990, en cohérence avec les émissions totales (somme des sources anthropiques et naturelles), qui sont restées pratiquement constantes au cours de cette période.

La concentration atmosphérique globale de N2O est passée de 270 ppb à l’époque préindustrielle à 319 ppb en 2005 (GIEC 2007), équivalent à 100ppm de CO2 (pouvoir réchauffant = 310 fois celui du CO2, tableau 2). Le protoxyde d’azote gazeux naturel provient des océans, d’origine biologique il est produit par dénitrification dans les milieux anaérobies et par nitrification dans les milieux aérobies. 1/3 des émissions totales de N2O sont anthropogéniques, et proviennent d’une part des sols agricoles et de l'alimentation de bétail et d’autre part de l'industrie chimique. Son « fit » avec la courbe de croissance démographique (non figuré dans la fig. 11) est de ce fait moins bon que celui du méthane.

 

 

Zone de Texte: Fig. 11: comparaison de l’évolution de la température, avec la  concentration de CO2 et CH4dans l’atmosphère depuis le XVIII° siècle et la production des énergies fossiles (charbon-pétrole-gaz).

 Les contributions anthropiques aux aérosols (essentiellement des sulfates, du carbone organique, du carbone noir, des nitrates et des poussières) produisent globalement un effet de refroidissement. La courbe de la concentration en SO4 dans les glaces (Fig. 11) est le reflet direct de sa concentration dans l’atmosphère. Sa forme est si particulière qu’elle ne peut être corrélée à la production  d’aucun des combustibles fossiles. On admet généralement une origine industrielle au soufre atmosphérique, même s’il existe des incertitudes considérables sur les quantités totales de SO2 émises (et de et NOx d’ailleurs). On suppose que les émissions naturelles représentent 25 à 50% des émissions totales de SO2. La diminution du taux de soufre dans l’atmosphère depuis les années 90 est le fruit des efforts des pays dits développés pour réduire leurs émissions, en Europe en particulier.

Comment se traduisent ces évolutions des gaz à effet de serre sur la température ? On peut décomposer la courbe des températures de la figure 11 en 4 périodes :

1 -Il est intéressant de remarquer que la température n’augmente absolument pas avant 1910-20 (point 1 de la courbe) c’est à dire au moins 50 ans après le premier changement de pente dans la courbe de concentration en CO2 atmosphérique, et alors que la consommation de charbon a régulièrement augmenté pendant ce temps! 50 ans sont une durée bien trop grande pour admettre que ce retard est simplement lié au temps de transfert et d’homogénéisation du CO2 de l’atmosphère (environ 10 ans). Il faut donc supposer que les conditions naturelles durant cette période sont telles qu’elles annulent le forçage anthropique (autre nom de l’effet de serre) durant cette période.

2 -Inversement, l’augmentation régulière de la température entre 1920 et 1945 (point 2 de la courbe) ne correspond pas à une augmentation brutale de la consommation des ressources fossiles, dont l’inflexion se situe un peu avant 1960 ; ce fait est confirmé par la courbe des teneurs en CO2 atmosphérique. Face à cette augmentation régulière des index (ressource et concentration en CO2), on peut supposer que le forçage anthropique n’a que peu varié par rapport à l’époque précédente, et admettre que les conditions naturelles se sont modifiées de telle sorte qu’elles cessent de masquer le forçage anthropique.

Entre les points 2 et 3 de la courbe de température, la période 1945-1975 apparaît similaire à celle de l’époque relativement froide ante-1910. Pourtant, le point d’inflexion des courbes de CO2 et/ou de consommation des ressources fossiles est franchi vers 1955-1960 avec une rupture de pente très marquée pour le CO2! Le forçage anthropique est donc à nouveau complètement masqué par des conditions naturelles à nouveau froides, voir encore plus froides que durant la période historique antéindustrielle indemne de forçage anthropique.

3 -Depuis 1975, la courbe des températures est repartie à la hausse régulière, avec une pente moyenne un peu plus forte que celle de la période 1910-1945 ; l’interprétation de la courbe donne 0.014°Ca-1 et 0.018°Ca-1 respectivement[2]. Seules les dernières années, depuis 2006, paraissent à nouveau échapper à la hausse. Si l’on considère l’enveloppe de la consommation des ressources naturelles, sa pente ne diffère pas de celle de la période précédente (2-3), et reste considérablement plus forte que celle de la première période de réchauffement. L’augmentation de CO2 est aussi beaucoup plus forte durant ce second épisode de réchauffement que durant le premier. Devons nous donc supposer que les conditions climatiques naturelles sont redevenues moins froides (sauf dernières années ?) et ne permettent à nouveau plus de masquer le forçage anthropique ?

Pourquoi la période de démarrage industrielle 1850-1910, bien marquée par un accroissement de la teneur en CO2 atmosphérique ne subit-elle pas un début de réchauffement ? Les conditions climatiques naturelles  étaient-elles déjà orientées vers un refroidissement masquant les premiers effets d’un réchauffement ?

Durant les 2 épisodes de réchauffement observés, les conditions climatiques naturelles ont-elles seulement cessé de masquer le forçage anthropique ou ont-elles contribué au réchauffement ? La question est complexe, que la communauté scientifique tente de renseigner en établissant des modèles comme celui qui figure dans le rapport 2001 de l’IPCC.

Zone de Texte:   Fig. 12 : modèles de réchauffement IPCC

Ce modèle climatique IPCC (Fig. 12) est utilisé pour simuler les changements de température dus à la fois à des causes naturelles et à des causes anthropiques. Les simulations sont représentées par la bande grise :

a)     les modélisations sont effectuées avec les forçages naturels seulement, tenant compte de la variation du rayonnement solaire et de l'activité volcanique.

b)    les simulations sont effectuées avec les forçages anthropiques, tenant compte des gaz à effet de serre et des aérosols sulfatés (estimation). Si le début du siècle semble assez bien modélisé, il est à remarquer que les valeurs des températures obtenues deux modèles a) naturel pur et b) anthropique seul, se situent en dessous de la courbe des températures observées (en rouge) pour la seconde moitié du 20°siècle.

c)     On parvient néanmoins en combinant les deux modèles (en en faisant varier les proportions) à caler l’ensemble sur la courbe des mesures. La prédiction serait-elle à notre portée ?

L’approche de ces processus très complexes nous a montré combien l’interaction des nombreux paramètres rend la prévision souvent délicate, peut-être même n’est-elle pas encore accessible à nos outils de mesure et d’analyse des valeurs. Comme le souligne C. Allègre (2007) la courbe des températures retenue n’est pas incontestable, tant les moyennes à l’échelle de la planète sont difficiles à établir, en raison l’importance de la variabilité horizontale et verticale de la température dans la troposphère. Ainsi celle qui figure dans le rapport 2001 (Fig. 13a) diffère-t-elle considérablement de celle du rapport IPCC de 1990 (Fig. 13b). En effet, celle de 2007 ne montre plus le pic médiéval. Cet optimum des XI° au XIII° siècle paraît pourtant être d’échelle comparable au réchauffement actuel. Ainsi connaît-on, durant cette période chaude, l’épopée Viking au « Pays Vert », la floraison de roses en Janvier et la vigne cultivée dans le nord de l’Angleterre. Cette période est suivie trois siècles plus tard d’un petit âge glaciaire lui aussi parfaitement documenté dans les archives européennes : replis des Viking devant l’invasion des glaces, difficultés agricoles de toute l’Europe. Fallait-il l’oublier dans le dernier rapport du GIEC ? En outre, l’approche systémique de ces phénomènes complexe n’est pas une démarche encore complètement aboutie et l’étude des variations climatiques est d’abord l’affaire des climatologues. Les mesures des teneurs en CO2 opérées au XIX° par des chimistes n’ont pas été utilisées. Les méthodes employées à l’époque sont encore considérées comme précises (± 6 ppmv en 1857) et elles nous offrent une image avec un pas de temps (fig. 14, courbe bleue) que les glaces ou les sédiments ne peuvent atteindre (petites + dans la figure). La distance entre les deux courbes (bleue et rouge) peut en effet laisser à penser que la dépendance de la température vis-à-vis de la teneur en CO2 est loin d’être acquise. Néanmoins il convient d’accueillir ces informations avec prudence, entre autre parce que les valeurs mesurées à l’époque le sont en zone économiquement développée seulement, donc potentiellement polluées.

Zone de Texte: Fig. 13: courbes de température des rapports IPCC de 1990 et 2001 pour le dernier millénaire ; 
 
a) Courbe modèle 2001 utilisée dans la figure 7
   
b) Courbe du rapport de 1990
 
  

L’une des empreinte des gaz à effet de serre sur la température de l’atmosphère, prévue par les modèles, considérée comme caractéristique et donc recherchée, est la présence d’un point chaud aux basses latitudes, à environ 10km d’altitude (tropospheric hotspot, Fig. 15). Aucun point chaud n’a été observé et depuis 2007 la discussion fait rage : Les modèles de circulation globale sont-ils pris en défaut ? Les phénomènes d’amplification de l’effet de serre sont-ils contrôlés par d’autres variables que celles prises en compte, telles que la variation de la teneur en vapeur d’eau avec l’altitude par exemple ? Les relevés de température de la troposphère sont-ils déficient ? Est-ce toute notre appréciation du principe même de l’effet de serre qui est à revoir ?

Zone de Texte: Fig. 15 : Coupes NS de l’atmosphère après 1 siècle d’effet de serre (XX°),  comparaison entre : 
1) le modèle de températures, GIEC 2007, Chp 9 Fig. 9f, sum of all forcings :				 2) les valeurs observées actuellement
a)solar forcing, (b) volcanoes, (c) wellmixed greenhouse gases, 
(d) tropospheric and stratospheric ozone changes, (e) direct sulphate aerosol forcing.
                                                                  
U.S. Climate Change Science Program Synthesis and Assessment Product 1.1, Chp 5 p 116

En nous proposant « Sa vérité sur la planète » Claude Allègre (2007) rappelle que le consensus, maître mot de la démarche actuelle n’a aucun sens dans le domaine de la science, qui doit rester celui de la raison ; il a en effet servi dans le passé à discréditer les plus novateurs de leurs contemporains (e.g. A. Wegener ou Giordano Bruno). Bien sûr, il est tentant pour le scientifique de vouloir éclairer le politique du résultat de ses recherches. La démarche est elle légitime ?

Zone de Texte: Fig. 16a : Recul des glaciers dans le monde depuis 5 siècles.
 
De même, l’ouvrage « Un appel à la raison » de Nigel Lawson (2008), ancien secrétaire d'État à l'Énergie en Grande-Bretagne, vise à démontrer que la pensée dominante ne repose pas toujours sur des bases solides, que le remède proposé, la réduction des émissions de gaz à effet de serre, est une solution inapplicable, et que l’adaptation au changement serait probablement plus féconde. En effet, est-il raisonnable de penser que les états riches d’énergies fossiles, le charbon en particulier, vont se priver de cette ressource ? La réponse sera certainement « oui » dès lors que d’autres énergies, renouvelables par exemple, seront économiquement acceptables, mais pas avant ! Fermons cette parenthèse, et revenons à nos incertitudes.

Le recul des glaciers continentaux en de nombreux points du globe (Fig. 16a) est un indice essentiel de l’augmentation de la température. La figure 16a montre que l’accélération du recul, lorsqu’elle est observable, se produit vers les années 1930, en même temps que la rupture de pente dans la courbe d’élévation du niveau marin. Globalement, le recul des glaciers continentaux apparaît bien antérieur à cette accélération. La figure montre que nous disposons même d’observations plus anciennes que 1850 pour 6 glaciers. A cette période ante-industrielle, le Vatnajokull (Islande) avançait  et 2 glaciers alpins, L’Argentière et le Grindenwald, étaient stables. Par contre, les Glacier du Rhône et le Franz-Joseph (Nouvelle Zélande) étaient déjà clairement en recul. Est-ce à dire que le recul des glaciers peut être un phénomène plus ancien que le début de l’accumulation de CO2 industriel?

La courbe d’élévation du niveau marin produite par le GIEC 2007 (Fig. 11) ne débute hélas pas avant 1870. Elle montre d’une part que la pente de cette courbe change vers 1920-30 et d’autre part qu’une élévation régulière est mesurable pour la période 1870-1920. On admet que 50% de l’élévation du niveau des mers au cours du XX° siècle (période de recul maximum des glaciers) est due à la dilatation thermique de l’océan et 50% est du à la fonte des glaciers ; donc, durant les décades précédentes plus froides, 1870-1920, non marquées par une augmentation de la T° (Fig. 11), l’essentiel du signal doit correspondre au recul des glaciers. Au regard de la pente régulière du tronçon 1870-1920, on peut penser que d’élévation du niveau marin à commencé avant 1870… Recul précoce des glaciers et élévation précoce du niveau marin, en contradiction avec la courbe des températures moyennes, auraient-ils une cause commune autre que l’élévation de Zone de Texte: Fig. 16b : non corrélation entre longueur des glaciers alpins et température estivale
 
température ?

C. Vincent.et al. (2005) ont montré, pour les glaciers alpins, qu’il n’y a pas de corrélation entre le recul des glaciers et la température (fig. 16b). mais que la cause du recul réside en fait dans une modification de la pluviosité et des chutes de neige Pour ces glaciologues du Laboratoire de Glaciologie et Géophysique de l’Environnement de Grenoble le paradoxe du recul généralisé des glaciers alpins à la fin du Petit Age de Glace il y a 150 ans résulterait en fait d’une diminution de plus de 25% de la précipitation neigeuse hivernale, alors que les températures estivales restaient stables. Par contre l’accélération du recul des glaciers durant la seconde partie du XX° siècle pourrait, elle, sans doute résulter directement de l’augmentation de la température observée ? D’une manière globale, le problème de la fonte des glaces n’est pas encore bien compris :

1 -   Dans l’hémisphère Nord, le recul de la banquise et la fonte de l’inlandsis groenlandais sont incontestables,  rapides, et en accélération ;

2 -   Dans l’hémisphère Sud, le bilan global effectué pour l’antarctique ces dernières années par les équipes du GIEC (Davis et al. 2005 ; Zwally et al. 2006) a permis de montrer que les bilans locaux peuvent être positifs ou négatifs (Fig. 17). Les variations sont faibles et leur amplitude est du même ordre que l’erreur liée à la mesure. Il faut donc les surveiller de très près en fonction de l’évolution à venir du climat. Elles signifient en effet que, pour l’heure, la contribution de l’antarctique à l’élévation du niveau marin est négligeable, mais pourrait ne pas le rester si la température terrestre devait augmenter.

Au regard de l’ensemble des données rapportées dans ce poly, il est tentant de conclure qu’elles sont souvent largement contradictoires, contrairement à l’utilisation médiatique qui en est faite. Faut-il alors admettre que les causes de l’augmentation de température de notre atmosphère sont multiples ? Qu’elles ne résident pas dans le seul accroissement anthropique de la concentration en gaz et en aérosols à effet de serre? N’oublions pas qu’avant l’homme, se sont les variations de la température qui ont déclenché une covariation des gaz à effet de serre et non l’inverse. Faut-il aller, à contre-courant, à la recherche de causes externes (non anthropiques) pouvant expliquer aussi bien les variations de température de notre atmosphère ? Cette piste n’est pas nouvelle, tentons de la remonter un peu et revenons alors à la source même de l’énergie dissipée dans notre atmosphère.

Zone de Texte: Fig. 17 : taux de variation de l’altitude de la surface glaciaire antarctique (dS/dt); mesures radar altimètre effectuées de 19920 2003 over the Antarctic Ice Sheet. Triangle = Zone de front de glace fortement (30 cm/an) aminci (bleu) ou épaissi (rouge).

Les radiations solaires, UV, visible et IR sont en fait le premier facteur qui régit le climat. Cette source d’énergie n’est pas exactement constante, et il a été observé depuis le début du XX° siècle des corrélations étroites entre l’activité magnétique du soleil et la fréquence des taches solaires. Celles-ci sont d’ailleurs observées depuis plusieurs siècles et les variations de leur nombre ont été mises en relation avec un  cycle d’activité de 11 ans environ. En fait, cette période n’est pas exactement constante, et plus le soleil est actif (plus le nombre des taches augmente) plus la période de ce cycle se raccourcit, jusqu’à moins de 10 ans. Parmi plusieurs tentatives menées dans les années 85-95 pour évaluer l’incidence de l’activité solaire sur le climat terrestre, celle d’E. Friis - Christensen et K. Lassen en 1990 est la plus « probante ». Les auteurs ont comparé pour la période 1860-1980 (Fig. 18) la courbe de température moyenne de l’atmosphère (courbe rouge) avec la moyenne de l’activité solaire (à gauche), définie par l’intervalle entre deux maxima de taches solaires (courbe noire). La coïncidence est remarquable, bien meilleure que celle entre la courbe de température et de la teneur en CO2 (même figure à droite, et « presque aussi bonne » que le modèle complexe anthropique + naturel de l’IPCC, qui rappelons le, prend en compte l’activité solaire (Fig. 12c). A en croire les auteurs, l’activité solaire seule aurait suffi à expliquer l’essentiel de la variance de la température de l’atmosphère pour la période 1890-1990. Les variations de la luminosité du Soleil sont faibles et ne montre pas un accord aussi parfait (pas de figure).

Zone de Texte: Fig.18 : Courbes comparées de l’activité solaire, du CO2 atmosphérique et de la température de l’atmosphère

Aussi en l’absence d’une théorie explicative convaincante de l’influence solaire, les modèles les plus récents continue-t-il à minimiser l’influence solaire en face de celle des gaz à effet de serre et le rapport du GIEC 2007 considère que « les variations de l’éclairement énergétique solaire ont provoqué, depuis 1750, un léger forçage radiatif de + 0,12 [+ 0,06 à + 0,30] W/m2, soit moins de la moitié de la valeur estimée figurant dans le troisième Zone de Texte: Fig. 19 : la fin du cycle 23 était prévue pour 2007 et le cycle 24 était programmé comme plus actif que le cycle 23 ; Le démarrage du cycle 24 fut ensuite annoncé pour 2008, mais on observe en mars 2009 qu’il n’est pas encore survenu. Conformément au modèle de Fairbridge, l’activité du cycle 24 (en rouge) est maintenant revue à la baisse
 
http://www.swpc.noaa.gov
Rapport d’évaluation ».

Mais plusieurs astrophysiciens considèrent que le problème est mal posé, et que seule la partie haute énergie du spectre UV du Soleil, responsable de la fabrication de l’Ozone mais aussi en même temps du chauffage de la haute atmosphère qui conditionne toute la structure thermique de l’atmosphère doit être pris en compte ; or les variations de la concentration d’ozone avec les cycles solaires pourraient expliquer 20% de la variation de la température. Les données les plus récentes obtenues sur la tranche de 8 premiers Km à partir des satellites et non les valeurs au sol, suggèrent qu’un découplage entre valeurs du CO2 atmosphérique et température est en train de se produire, confirmant le rôle essentiel de l’activité solaire. D'après R. Fairbridge, et selon I. R. G. Wilson, B. D. Carter et I. A. Waite 2008, ce sont les déplacements du Soleil autour du Barycentre de notre système qui sont à l'origine des variations de l'intensité et des durées des cycles éruptifs du soleil. Bien évidemment la position des deux géantes gazeuses, Jupiter et Saturne jouent un rôle prépondérant. L’étude historique des cycles solaire a montré que l’activité solaire est minimale et la durée du cycle est maximale lors de leur alignement, correspondant à un déplacement maximum du Soleil. L’affaiblissement du cycle 23 et le démarrage très retardé du cycle 24 (Fig. 19) sont conformes au le modèle "SIM" (Solar Inertial Motion, mouvement inertiel du soleil) de R. Fairbridge. Celui-ci prédit une atténuation nette et progressive des cycles solaires de 2010 à 2040. Faut-il en conclure, par opposition au modèle GIEC un refroidissement généralisé de la planète ?

Pour Enrik Svensmark (2007) et son équipe du Centre national danois de l’espace (DNSC, Copenhague) la relation entre l’activité solaire et le réchauffement climatique réside dans l’interaction entre la formation des nuages de basse altitude, qui accroissent l’effet de serre (contrairement aux cirrus dont les paillettes de glace augmentent l’albédo de la planète) et le rayonnement cosmique d’origine galactique. Plus celui-ci pénètre notre atmosphère et plus l’ionisation qu’il y produit est favorable à la nucléation des gouttes d’eau. Les nuages se forment en effet par condensation de la vapeur d’eau présente dans l’atmosphère. Pour que cette condensation se fasse, un peu comme la buée se forme sur une surface froide, il faut, outre le refroidissement de la parcelle d’air environnante, la présence de petites particules (aérosols). La variation de l’activité solaire, que traduit le nombre des taches, accroît ou diminue l’intensité de son champ magnétique. Celui-ci constitue donc un bouclier d’efficacité variable, détournant plus ou moins le rayonnement cosmique de la Terre, qui modulerait de ce fait l’action du champ galactique sur la nucléation des nuages. Ont-ils raison ?

Le déstockage des combustibles fossiles est considérable. Il rend à l’atmosphère une partie du carbone lentement minéralisé, mais ne nous trompons pas, l’essentiel du CO2 atmosphérique initial n’est pas stocké en charbon ou en pétrole, mais bien en calcaire (CaCO3, voir § F3), et il nous faudrait bétonner, et bétonner encore pour épuiser cette ressource carbonée et retourner à l’atmosphère primitive de la Terre ! Faut-il pour autant balayer d’un revers notre capacité à nous nuire à nous-mêmes ?

 

2 - La stratosphère et la protection contre les UV solaires

Elle s’étend jusque vers 50 km environ. L’air y est de plus en plus raréfié. Elle est caractérisée par sa température croissante, qui augmente jusqu'à +20 °C maximum. Les premières estimations de température de la stratosphère sont dues à F.A. Lindeman et G.M.B. Dobson. Elles sont fondées sur l’observation de la brillance et de la longueur des étoiles filantes, c’est à dire sur la vaporisation des météorites par frottement et l’excitation résultante des molécules stratosphériques. Partant de ces observations, Lindeman et Dobson déduisirent la densité et la température de la stratosphère.

a - Cycle de Chapman

Dès 1930, S. Chapman suppose que l’augmentation de la température dans la stratosphère est liée à la production de l’ozone par photodissociation de l’oxygène sous l’effet des UV solaires (Fig. 13). La concentration en ozone est maximum entre 20 et 30 Km. En moyenne, elle est quasi nulle dans la troposphère. L’épaisseur de la couche d’ozone pur que l’on pourrait former avec ce gaz est de 2.5 mm !

Son rôle n’en est pas moins fondamental dans la protection de la vie non aquatique puisque comme nous allons le voir, sa production absorbe une part essentielle des UV à haute énergie du spectre solaire.

Zone de Texte: Fig. 20 : cycle de Chapman, production-destruction de l’O3

 

La production de l’ozone dans l’atmosphère est assurée par la photodissociation du dioxygène O2 sous l’effet des UV courts. Ce mécanisme est double :

1) faible dissociation dans la mésosphère en dessous de 85 km par absorption d'UV de longueurs d'ondes comprises entre 175 et 200 nm ;

2) forte dissociation dans la stratosphère au-dessous de 50 km par absorption d'UV de longueurs d'ondes comprises entre 200 et 240 nm.

Après cette réaction de dissociation

( 1 ),                        O2 + hn → O +O

 

deux cas sont possibles:

1 -     soit une recombinaison en présence d’une tierce molécule M (N2, O2 ou particule solide),

( 1' )                        O +O (+M) → O2 +M,       

{réaction qui a lieu surtout à haute altitude (≥70Km)

2 -     soit la formation d’ozone

( 2 )                         O +O2 (+M) → O3 +M.  

 

La molécule M sert à absorber l’énergie de vibration de la molécule formée, liée à l’association O+O ou O+O2. Le maximum de photodissociation de l’oxygène à lieu vers 25 km d’altitude, et se traduit par un maximum de concentration en ozone, également dans la stratosphère. On a constaté que la quantité d'ozone stratosphérique se conforme aux variations du rayonnement solaire liées à la latitude ou à la saison, mais avec des décalages très importants. Ainsi, sa concentration est maximum au printemps et minimum en automne, et son abondance est supérieure aux hautes latitudes par rapport à celle des basses latitudes. Ceci démontre que l'ozone est instable, mais que les réactions chimiques de destruction sont relativement lentes, en tout cas par rapport au transport atmosphérique dans la basse stratosphère.

b - Quatre types de réactions rendent l'ozone formé instable:

En premier lieu

il peut être simplement recombiné à l’oxygène atomique

( 3' )                        O3 +O O2 + O2 

 

En second lieu

il peut être dissocié par des UV plus longs (l<310nm) que ceux qui provoquent                                                     la dissociation de l'O2 :

O3 + hn → O2 +O(1D)          ( 3 )

L’oxygène monoatomique O(1D) produit dans cette réaction est très excité et joue un rôle ultérieur sur la stabilité de l’ozone, à travers celle des constituants minoritaires de la stratosphère, H2O, NO2 en particulier. Il est en effet beaucoup plus réactif que l'oxygène normal au repos  O(3P).

 

En troisième lieu,

certains des constituants minoritaires de l'atmosphère interviennent naturellement à travers un            cycle catalytique de destruction de l’ozone, que l'on peut schématiser comme suit:

                             X +O3 XO +O2

                                              XO +O      X +O2

 

 


L'hydrogène monoatomique et le radical hydroxyle, H et OH, qui interviennent dans ce cycle comme suit,

                                H +O3 → OH +O2

( 4 )                                       OH +O      H +O2

 

 


H et OH ne sont pas produits dans la stratosphère, par photodissociation de l'eau comme dans la mésosphère, mais par des réactions avec l'oxygène excité O(1D):

l'hydrogène diatomique,

(4a)                      O(1D) + H2    OH + H

l'eau,

(4b)                      O(1D) + H2O OH + OH

le méthane

(4c)                      O(1D) + CH4 → OH + CH3

 

Les réactions (4a)  et (4b) ne peuvent pas être significativement renforcées par l'activité humaine. En effet, la teneur en eau de la stratosphère est d'une part extrêmement basse, et d'autre part en équilibre avec celle de la troposphère. Or celle-ci ne peut évoluer de manière importante car l'air terrestre est quasiment saturé en eau. Seule la destruction du méthane (4c) peut donc évoluer réellement négativement dans le futur.

 

Le monoxyde d'azote, NO, qui intervient aussi de la même manière dans le cycle suivant

                                 NO +O3     NO2 +O2

( 5 )                                               NO2 +O    NO +O2

 

 


trouve son origine encore dans une réaction de l'oxygène excité O(1D) avec de l’hémioxyde d’azote N2O; deux réactions sont possibles:

réaction productrice de NO

(5a)                      O(1D) + N2O        NO + NO

réaction non productrice de NO

                O(1D) + N2O        N2 + O2

 

Cette dernière réaction n'alimente pas le cycle, et au contraire en diminue l'efficacité. Compte tenu de l'abondance des produits azotés dans l'atmosphère, le cycle (5) pourrait s'avérer extrêmement destructeur s'il n'existait des réactions parasites qui attaquent le NO2 formé dans ce cycle:

 

(5b)      a)             NO2  + hn(l<240nm) → NO + O            

                         et                                                  O + O2 → O3

cette photodissociation très rapide du dioxyde mène donc finalement à la régénération de l'ozone. C'est le même phénomène qui provoque la production d'ozone troposphérique irritant pour nos bronches dans les régions polluées, par les gaz d'échappement en particulier.

(5c)      b)            NO2  + H + (M) → M + HNO3

l'acide nitrique produit de cette manière est un composé abondant de la stratosphère. Mais il est soluble dans l'eau et gagne la troposphère avec elle en franchissant la tropopause. Sa solubilisation régule ainsi sa concentration (constante) dans la stratosphère.

 

La production de l'hémioxyde N2O est donc une clé essentielle de la destruction de l'ozone; N2O présente une double origine:

a)                   il peut être produit en altitude par la combustion de l'azote diatomique avec l'oxygène, N2+2O2 à très haute Température, naturellement sous l'effet de la foudre, et artificiellement dans les réacteurs des avions volant à très haute altitude;

b)                   l’azote de l’air est transformé dans le sol en nitrates, dont une partie donne lieu (action de bactéries dénitrifiantes) à des produits gazeux, N2 et N2O, qui s’échappent dans l’atmosphère. Comme la durée de vie de ce dernier composé est suffisamment longue dans la troposphère, il atteint la stratosphère où, avant d’être photodissocié en N2 et O, il réagit en présence d'oxygène excité O(1D) suivant le processus (5a) pour produire du monoxyde d’azote.

 

En quatrième lieu,

certains composés naturellement rares, les composés halogènés[3] ont été introduits massivement dans l'atmosphère par  l'homme, sous forme de halocarbones, les CFC.

Ils interviennent tous de la même manière que le chlore, pris en exemple:

                                Cl +O3 Þ ClO +O2

( 6 )                                        ClO +O   Þ   Cl +O2

 

 


Mais ClO est instable et réagit avec le monoxyde d'azote, ce qui réduit d'autant les processus de destruction de l'ozone

ClO + NO Þ Cl + NO2

Certes, Cl est rendu au cycle catalytique, mais 1 NO est consommé en échange, et NO2 rentre dans les réactions positives (5b) et (5c).

 

Parmi les réactions qui limitent l'efficacité des cycles de destruction de l'ozone par les composés halogénés, on citera l'intervention du méthane sur le chlore:

Cl + CH4 Þ CH3 + HCl

Bien que l'acide chlorhydrique formé ici soit instable et réagisse avec les hydroxyles (1 OH consommé restituant 1 Cl) dans la réaction

HCl + OH Þ  H2O + Cl

 

De la même façon que l'acide nitrique dans le cycle azoté, HCl constitue un puits troposphérique pour les produits chlorés de la stratosphère, en se solubilisant dans l'eau après avoir traversé la tropopause. La consommation de CH4 est doublement intéressante car, outre le fait qu'il s'agit d'un gaz à effet de serre redoutable, le méthane intervient aussi dans la production d'hydroxyles dans le cycle (4c).

 

Les halocarbones sont des composés remarquablement stables dans la basse atmosphère, ce qui leur a conféré un intérêt industriel tout particulier. En contrepartie, ils ne sont pas détruits dans la troposphère par des réactions chimiques, et finissent par gagner la stratosphère, où ils sont photodissociés et où ils libèrent les atomes de chlore qui attaquent l’ozone (6)

 

Un seul produit halocarboné est naturel, le chlorure de méthyle, CH3Cl; d’origine naturelle marine, il est aussi certainement un constituant de la fumée qui apparaît lors de la combustion des végétaux, qu'il s'agisse du brûlage des terres, de l'essartage des forêts ou de la culture sur brûlis, mais aussi de la combustion de produits chlorés (polyvinyles). Tous les autres composés halogénés présents dans l'atmosphère terrestre sont des produits industriels, citons le tétrachlorure de carbone, CCl4,  et parmi les fréons, le trichlorofluorométhane CFCl3 (Fréon 11) et le dichlorodifluorométhane, CF2Cl2 (Fréon 12), gaz propulseurs et/ou réfrigérants. La production annuelle de CFCl3 est passée de 1 000 T. en 1947 à  35 000 T. en 1957, puis 150 000 T en 1967 et 310 000 en 1989 … imposant, dès lors que des solutions techniques de remplacement étaient trouvées, une réflexion mondiale sur leur utilisation.

 

c – Impact des SAO

Zone de Texte: Fig. 22 : en haut, anomalie de la couche d’ozone (moyenne mondiale) corrigée des variations saisonnières, exprimées en % de la moyenne calculée pour la période 1964 – 1980 : mesures terrestres (ligne noire) et satellite (couleur) ; 
en bas, mesures moyennes de l’épaisseur de la couche d’ozone en octobre, spectrophotomètrie faite en Antarctique.
 
Dobson Unit (DU). la colonne (d'ozone) est présumée pure, à pression normale (1013.15 hPa) et à 0° C (273.15 K). La densité de la couche est exprimée en milli-centimètre (10-5m). 
300 DU correspondent à une épaisseur de couche de 3 mm,
http://www.ipcc.ch/; http://www.cactus2000.de/fr/unit/massozo.shtml; 

Zone de Texte: Fig.21 : Raies d’absorption des SAO.
 
Il est difficile d’établir le bilan global sur l’effet de serre des effets cumulés de la destruction d’O3 (qui compte au nombre des gaz à effet de serre) par les halocarbures et autres substances anti ozone (SAO) et du forçage radiatif induit par ces mêmes substances, dont les raies d’absorption sont observables dans les fenêtres 8-9 et 10-14 mm que nous avons définies plus avant (fig. 5) et ci-dessous dans la figure 14a. A la complexité chimique du cycle de l’Ozone s’ajoute une complexité de stockage. L’O3 est produite essentiellement sous les basses latitudes et elle rejoint ensuite les hautes latitudes où elle reste piégée dans le vortex solaire (voir § C2). Sa concentration y est maximale au printemps et passe, en automne, par un minimum, inférieur de quelques % relatifs.

 

Les mesures de concentration effectuées montrèrent, dans les années 85-90, que le minimum automnal atteignait 30 à 40% relatif au pôle Sud, le pôle Nord étant épargné par le phénomène (Fig. 14b, valeurs corrigées des variations saisonnières). La bonne connaissance du cycle de Chapman fit rapidement suspecter les CFC, bien que produits et utilisés principalement dans l’hémisphère Nord. La grande réactivité de l’industrie des aérosols — rapidement prête à mettre avec avantage sur le marché un gaz propulseur sans Chlore dans nos bombes et des fluides caloriporteurs dans la plupart des installations réfrigérantes ou climatisations — a fait disparaître très vite la pollution par le Fréon !

Et le trou de l’Ozone a commencé à se refermer, rapidement tout d’abord, puis ensuite à un rythme que la communauté scientifique considère comme anormalement lent, alors qu’aucune source de CFC ne vient plus détruire l’Ozone depuis l’accord de Montréal en 1997. Aurait-on imputé aux SAO une agressivité excessive, ou bien le poids volumique des CFC les entraînait-il moins que prévu vers la stratosphère, rendant leur éradication moins performante ? Faudra-t-il (et pourra-t-on ?) appliquer la même politique contraignante avec les NO2 dont nous avons souligné la nocivité ? Aurait-on omis quelque molécule dans le panel des SAO ?

Il convient, on le voit, de rester prudent à cet égard. La taille du trou autour du pôle dans la couche d’ozone reste une préoccupation de santé publique sous les hautes latitudes Sud, Chili, Argentine, Nouvelle Zélande en particulier, même si l’on espérer un retour à la normale d’ici moins d’un siècle.

 

 

3 - La mésosphère

Zone de Texte: Fig 23 : Eruption du Pinatubo, 1991 : 15 106 T de SO2 injectées dans la stratosphère, transformées en gouttelettes de H2SO4 absorbent (enrouge) l’énergie solaire ; durée du phénomène, 2ans. 
 
La connaissance de la mésosphère remonte aux années 50. On y a appliqué une méthode d’étude comparable à celle que Lindeman et Dobson utilisèrent pour la stratosphère, en mettant au point le suivi radar de billes lâchées à haute altitude par fusées. L’analyse de leur trajectoire permet de remonter à la densité de l’air et à sa température aux altitudes considérées. La température décroît rapidement avec l’altitude. Vers 80 km, elle atteint -140°C (Fig. 2).

 

Au-dessous de 85 km, la mésosphère, est encore le siège de la photodissociation de O2,  surtout par absorption entre 200 et 175 nm. Les oxygènes monoatomiques s'associent alors à de l'O2 pour former de l'ozone, mais en quantité très inférieure à l'ozone stratosphérique.

 

La mésosphère est aussi le lieu de la photodissociation de H2O et de CH4, toujours par des UV courts (<200 nm):

 

H2O + hn Þ OH +H ou  O +H2;

 

CH4 + hn Þ CH2 + H2

 

Cette région de l’atmosphère est en outre le siège des nuages noctiluques. La nature de ces nuages, observables seulement après le coucher du soleil, n’est pas encore bien connue. Il ne s’agit probablement pas de nuages de glace, car la quantité de vapeur d’eau disponible à cette altitude est très faible. Ils seraient plus probablement constitués de débris météoritiques ou de poussières cométaires, et/ou de poussières volcaniques (Fig. 15). En effet, on a pu observer à maintes reprises lors des éruptions à caractère explosif, éruptions pliniennes ou ignimbritiques[4], que les éléments fins de la colonne de produits volcaniques[5] peuvent atteindre plusieurs dizaines de Km d’altitude. En incorporant de l’air froid qui se dilate, les mouvements convectifs internes au panache entretiennent l’ascension des matériaux volcaniques. Ils atteignent ainsi aisément la stratosphère. A partir de là, une petite fraction de poussière pourrait rejoindre la mésosphère pour y former les nuages noctiluques.

 

Avec la dispersion du nuage dans la stratosphère les éruptions  peuvent provoquer une diminution de l’insolation qui peut être à l’échelle planétaire mais qui ne dépasse pas quelques mois (Tambora 1815, Krakatoa 1883, El Chichon 1982, Pinatubo juin 1991). La dispersion du nuage volcanique est aussi responsable de l’introduction d’aérosols (composés soufrés en particulier) dans la stratosphère. Leur rôle climatique est encore largement discuté.

 

 

4 - La thermosphère

Au-delà de la mésopause débute la thermosphère (Fig. 2). Elle s’étend jusqu’aux confins de l’exosphère, vers 500 Km (cf. § composition de l’atmosphère). L’air, quoique raréfié, freine malgré tout les satellites. C’est d’ailleurs l’analyse de leurs trajectoires qui a permis, dès le début des sixties,  de mieux connaître cette région de notre globe.

 

La température des molécules et atomes y croît très fortement, par absorption des UV très courts. Elle peut atteindre 2000°C au zénith, et chuter de plus de 500° durant la nuit ! Toutefois, la densité du gaz y est si faible que la chaleur transmise aux satellites est négligeable.

 

La photodissociation des gaz atmosphériques donne à ce brouet très clair une composition complexe, mélange d’oxydes d’azote, de molécules diatomiques, N2, O2, H2, et d’atomes, principalement d’oxygène et quelques hydrogènes. Elle est le siège des aurores polaires..

Au voisinage de l’exosphère, il semblerait exister un début de stratification par densité des gaz atmosphériques qui ne sont plus brassés par aucun vent.

 

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[1] Dans le détail, le problème est plus complexe car l’albédo de l’atmosphère aa et celui de la géosphère ag sont différents : l’atmosphère laisse passer le visible ou le réfléchit vers le cosmos, et absorbe la moitié des infra rouges (IR) qu’elle renvoie ensuite vers le cosmos ; le sol réfléchit ou absorbe le visible, et il absorbe tous les IR qui lui sont transmis par l’atmosphère. Si on appelle Irabs le coefficient d’absorption des IR par l’atmosphère, la fraction de flux IR absorbée par la Terre (qui participe au flux émis par la Terre) est de la forme Irabs/2 a Tt4. L’énergie totale réellement reçue par la Terre serait donc de la forme C*pRp2 (1 – aa) (1 – ag) + Irabs/2 a Tt4.

[2] Notez que la courbe utilisée donne une moyenne de 0.007°C a-1, conforme à la valeur communément admise (IPCC = Intergovernmental Panel on Climate Change) de 0.6° pour le XX°siècle. Remarquez aussi qu’une telle moyenne n’a aucun sens au regard des valeurs obtenues pour les épisodes de réchauffement, au moins deux fois supérieurs, mais heureusement entrecoupés de périodes « sans réchauffement ».

[3] à base de fluor (F), chlore (Cl), iode (I) et de brome (Br).

[4] La distinction entre les 2 types d’éruptions ne réside pas dans la nature du matériau, essentiellement rhyolitique (composition d’un granite), mais dans le mode de dissipation de l’énergie :

1 - dans une éruption plinienne, en colonne, la plus grande partie de l’énergie est dissipée dans une explosion initiale canalisée par un conduit étroit (Ø < 200m). Les vitesses d’émission peuvent atteindre 300m sec-1

2 - dans le cas d’une éruption ignimbritique, la nuée ardente présente à l'émission une densité supérieure à celle de l'air ambiant. Mais elle incorpore en dévalant les pentes du volcan une quantité importante d’air ambiant (froid) qui se dilate, conduisant le mélange vers une densité inférieure à la densité de l’air ambiant. Le panache volcanique peut alors s'élever, mais contrairement à celui d'une éruption plinienne, celui d’une ignimbrite prend naissance au front de la coulée et non au droit de la bouche d’émission.

[5] éléments fins = poussières, cendres et ponces, aérosols.