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CHAPITRE 1

Evacuer la Chaleur de la Planète

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La Température mesurée dans les mines, croît si vite avec la profondeur, en moyenne 30°C.Km-1 dans les continents, que l'on a admis longtemps que sous l'écorce solide, la Terre devait être encore liquide. En fait, si le gradient mesuré en surface était linéaire, la température serait si forte au centre (environ 200 000°) que la Terre devrait être volatilisée!

1 - Les sources de chaleur de la Terre

Avant la découverte de la radioactivité (Becquerel 1896), on était obligé d'admettre que la chaleur dissipée de nos jours était due exclusivement à l'énergie cinétique primitive emmagasinée sous forme de chaleur lors de la formation de la Terre. Cette chaleur primitive d'origine gravitationnelle a été récupérée lors des 500 premiers millions d’années de la vie de la Terre. En un premier temps, c’est la condensation du gaz et des poussières de la nébuleuse en petits corps qui transforme son énergie potentielle en chaleur. Puis se sont les impacts entre corps, puis entre planètésimaux qui transforme de l’énergie gravitationnelle en chaleur. Enfin, dans une Terre que l’on s’accorde à penser être devenue entièrement liquide, la différenciation du noyau en fer et nickel achève cette période de récupération de l’énergie gravitationnelle en chaleur. Si l’on imagine que la Terre fut essentiellement liquide dans un premier temps mais qu’elle ne l’est plus de nos jours, il faut ajouter à cette énergie initiale la chaleur latente de cristallisation de la planète. En outre, le changement de densité qui accompagne ce changement d’état implique la récupération simultanée d’un peu d’énergie gravitationnelle en chaleur. Pour en terminer avec les sources de chaleur primitive, il faut ajouter le rôle des éléments radioactifs à vie courte, 129I et en particulier 26Al, de période 740 000 ans. Leur contribution fut éphémère et peut être considérée comme négligeable au-delà de 10 périodes [1] .

Zone de Texte: Tableau 1, bilans énergétiques internes
Nature	lieu de dissipation	quantité d’énergie
 1012W
radioactivité	croûte continentale
croûte océanique
manteau supérieur
manteau inférieur
noyau	4.2 - 5.6
0.06
1.3
3.8 - 11.6
0 - 1.2

chaleur initiale	manteau
noyau	7 - 14
4 – 8

chaleur de différentiation
chaleur latente de cristallisation
énergie gravitaire	noyau liquide	
1 - 2.8
1

mouvements différentiels	manteau	0 – 7

processus tectoniques	lithosphère	0.3

séismes	lithosphère	0.03

météorites		?

	total	42

On estime à 4.2 1013 W le flux de chaleur qui traverse actuellement l’interface lithosphère-atmosphère, soit 82 mw.m-2. Cette estimation est faite à partir de mesures de surface dont la répartition n’est certes pas homogène, mais elle nous semble satisfaisante. A titre indicatif, soulignons que cette énergie interne que dissipe la Terre dans l'espace est environ 104 fois plus faible que celle qu'elle reçoit du Soleil !

Les bilans d’énergie que l'on dresse de nos jours montrent (tableau 1 et Fig. 4) que 50% au moins de l'énergie interne dissipée provient de la désintégration des éléments radioactifs à période longue (238U, 235U, 232Th, 40K en particulier). On connaît bien la quantité de chaleur produite par unité de masse de U, Th ou K, et l’on connaît très bien la composition de la croûte supérieure ; l’estimation de la production est donc aisée pour cette tranche superficielle. Par contre on connaît moins bien la croûte inférieure. De même, on connaît relativement bien le manteau supérieur, grâce en particulier aux ophiolites, véritables radeaux de lithosphère océanique déposés sur les continents, mais nos connaissances sur le manteau inférieur restent très limitées. Néanmoins, on peut proposer le schéma suivant :

1-      les chaînes de désintégration de l’Uranium 238U Þ 206Pb, de période l=4.5 Ga, et 235U Þ 207Pb (l=0.71 Ga) produiraient 1013 watts dans le manteau ;2-      Zone de Texte: Fig. 4, Bilan énergétique interne
 
La chaîne 232Th Þ 208Pb (l=14 Ga), produirait aussi 1013 watts dans le manteau ;3-      La chaîne 40K Þ 40A,40Ca (l=1.28 Ga) serait responsable de 0.4 1013 watts dans le manteau4-      Ces sources U, Th, K dégageraient 0.8 1013 watts dans la croûte. Bien que celle-ci représente un petit volume par rapport à celui du manteau, elle apporte une contribution comparable à celle du manteau supérieur, car les éléments radioactifs à vie longue y ont été concentrés principalement par différenciation à partir du manteau supérieur, qui représente les 670 premiers Km du manteau terrestre.

Le total représente 3.2 1013 watts. Il reste donc 1013 watts qui représentent la part de la chaleur initiale, soit environ 24%

Le comportement du potassium lors de la différenciation initiale de la Terre (Cf. § météorites différenciation) n'est pas encore clairement compris. Si l'on admet qu'une partie du 40K a été entraînée dans le noyau liquide lors de cet épisode, celui-ci possède sa propre centrale. Dans le cas contraire, l’énergie radioactive du noyau est nulle et il doit compter sur la chaleur sensible qu'il détient encore ¾ chaleur initiale plus chaleur accumulée par les éléments radioactifs à vie courte (129I ou 26Al par exemple) disparus depuis longtemps ¾ et sur la chaleur latente de cristallisation pour fonctionner (cf. § noyau).

 Si l’on considère les contributions respectives de la croûte et du manteau, on remarque que le gradient géothermique doit nécessairement diminuer avec la profondeur, au moins dans le manteau supérieur. L'augmentation de T° n'est donc pas linéaire et l'intérieur de la Terre n'est pas nécessairement liquide.Les sondages les plus profonds ne dépassent guère la dizaine de Km, 12 Km environ dans le forage scientifique de la presqu'île de Kola en Russie, et les difficultés techniques rencontrées sont déjà énormes (temps de montée des trains de tiges, T° proche de la T° de fusion du matériel, circulation du fluide de refroidissement - lubrification...). Il ne paraît pas possible de dépasser beaucoup cette profondeur dans un futur proche. Les approches indirectes de la géophysique ¾ la gravimétrie, le géomagnétisme et tout particulièrement la sismique ¾ constituent nos seules fenêtres pour observer l'intérieur de la Terre, nous y reviendrons au chapitre 3.

Nous disposons toutefois en surface de deux échantillonnages distincts :

1-      les basaltes qui proviennent du manteau remontent des fragments intacts de la partie supérieure du manteau très significatifs des 200 premiers Km de profondeur, que nous évoquerons au chapitre 4.

2-         les météorites, tombées du ciel, et qui nous procurent des éléments de comparaison avec le reste du système solaire ; Elles font l’objet du chapitre 2.

2 – L'etat thermique de la Terre

Zone de Texte: Fig. 5 : carte du flux de chaleur géosphérique actuel. 
 
http://www.geo.lsa.umich.edu/IHFC/heatflow.html
Les rides océaniques constituent les frontières des plaques divergentes. Leu manteau chaud monte jusqu'à la surface puis se refroidit en s'éloignant de la dorsale. Le flux de chaleur mesuré près des dorsales océaniques est très élevé (110mWm-2). Le manteau étant quasi affleurant en cet endroit, ce flux est celui du manteau ascendant sous les dorsales. La carte mondiale du flux de chaleur de W.D.  Gosnold (Fig. 5) Il décroît systématiquement en s’éloignant de la ride vers les fosses océaniques, 48 mWm-2 (Poly « LDC, La dérive des continents »). L'évolution thermique de la lithosphère océanique peut ainsi être modélisée par le refroidissement d'une plaque d'épaisseur constante. Le calcul permet d'établir comment varie le flux de chaleur en fonction de l'âge (Fig. 42 poly LDC). Dans les bassins océaniques d'âge supérieur à 80 Millions d'années (Ma.), le flux mesuré ne varie pas considérablement et la lithosphère est proche de l’état d'équilibre thermique. La croûte océanique étant mince (Chp. 4.E.2.a) et pauvre en éléments radioactifs, on peut admettre que la valeur du flux de surface est voisine de celle du flux en provenance du manteau hors des ascendants mantelliques, soit environ 50 mWm-2. Néanmoins les régions les plus anciennes de la lithosphère océanique (Chp. 4.E.2a), côtes Est américaine et Ouest africaine de l’océan Atlantique Nord, plancher du vieil océan avorté entre Afrique et Madagascar, plancher Pacifique du Sud-Est du Japon à l’Est des Philippines, sont aussi parmi les plus froides.Dans les continents, la figure 5 montre que le flux de chaleur est globalement faible. La croûte est beaucoup plus épaisse et très hétérogène (Chp. 4.E.1), et elle contient des quantités importantes mais variables d'éléments radioactifs (U, Th et K). Nous ne sommes donc pas en mesure de construire un modèle simple et fiable du flux de chaleur continental actuellement. Il faut mesurer [2] ce flux en effectuant le plus grand nombre possible de mesures dans des provinces géologiques différentes. C. Jaupart et J. C. Mareschal (1999)  puis J. C. Mareschal, A. Poirier e al 2000) ont montré à propos du bouclier canadien, qui  est constitué de grandes provinces géologiques d'âges très différents (Chp. 4.E.1.a, Fig. 26a), qu'il n'y a pas de tendance à la décroissance du flux avec l'âge géologique. le flux de chaleur ne décroît pas non plus d'une manière systématique vers le bord du continent nord américain. Mais le flux varie de manière significative entre les différentes ceintures d'une même province, et ces variations ne peuvent être dues qu'à des différences de composition de la croûte. Les données de flux de chaleur du bouclier canadien montrent ainsi la difficulté de définir une colonne crustale typique ou moyenne pour les études thermiques.

Par contre, il faut noter que le flux de chaleur varie rapidement en bordure des continents : les mesures de flux de chaleur dans la mer du Labrador indiquent des valeurs variant de 48 et 59 mWm-2 à plus de 75 mWm-2. Ces valeurs montrent une transition abrupte du flux de chaleur du manteau (quelques x100 km) qui confirme la différence de nature et ‘épaisseur des deux types de croûte. Si la valeur du flux de chaleur en provenance du manteau est une donnée fondamentale pour la structure thermique crustale, elle permet aussi de contraindre les valeurs de l'épaisseur de la lithosphère continentale. Le flux du manteau étant limité à une gamme très restreinte, l'épaisseur de la lithosphère est elle aussi limitée (voir Chp. 4B4 la différence fondamentale qui existe entre lithosphère et croûte). La lithosphère ne peut pas être plus mince que 200 km environ et plus épaisse que 350 km. D’après les auteurs, la lithosphère dans l'est du bouclier canadien a une épaisseur variant entre 200 et 250 km.

 

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[1] Rappels : la période T (demi-vie) d’un élément radiogénique est proportionnelle à la constante de désintégration l qui représente la probabilité de désintégration de cet élément par unité de temps, T=Ln2/l; l’expression de la concentration C de cet élément en fonction de sa concentration initiale C0 et du temps t est de la forme C = C0.e-lt

[1] La température est mesurée en fonction de la profondeur dans un forage avec une précision de 0.005 K. La conductivité thermique est mesurée pour les roches du forage en laboratoire. Le gradient thermique est mesuré sur une épaisseur finie dans un milieu souvent hétérogène. Le profil thermique peut subir plusieurs types de perturbations qui sont quantifiés (topographie, circulation d'eau, variations de composition ...). Enfin les variations du climat ont engendré des changements de température à la surface de la Terre. Ces perturbations peuvent être détectées et éliminées par des mesures dans plusieurs forages profonds. En pratique, le gradient géothermique est mesuré dans des forages dont la profondeur est supérieure à 250 mètres . http://www.ipgp.jussieu.fr/pages/060204.php

[2] La température est mesurée en fonction de la profondeur dans un forage avec une précision de 0.005 K. La conductivité thermique est mesurée pour les roches du forage en laboratoire. Le gradient thermique est mesuré sur une épaisseur finie dans un milieu souvent hétérogène. Le profil thermique peut subir plusieurs types de perturbations qui sont quantifiés (topographie, circulation d'eau, variations de composition ...). Enfin les variations du climat ont engendré des changements de température à la surface de la Terre. Ces perturbations peuvent être détectées et éliminées par des mesures dans plusieurs forages profonds. En pratique, le gradient géothermique est mesuré dans des forages dont la profondeur est supérieure à 250 mètres. http://www.ipgp.jussieu.fr/pages/060204.php