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terre_ronde
Les
enveloppes rocheuses de
retour
La
théorie des plaques lithosphériques ne nous dit rien de la convection mantellique profonde. Les basaltes échantillonnés en surface
peuvent contenir des fragments du manteau, dont ils sont issus par fusion
partielle. Le manteau terrestre nous est aussi accessible directement le long
de certaines failles transformantes océaniques à très fort rejet, comme la
fracture de Vema dans l’atlantique, et de manière à peine moins directe dans
les ophiolites. Ces dernières sont des pans entiers de dorsale ou de plancher
océanique, qui sont venus s’échouer après un épisode tectonique majeur sur la
bordure des continents.
Quelle
que soit leur origine, ces fragments nous renseignent directement sur la minéralogie du manteau supérieur, ou
plus exactement de la partie supérieure (
Les enclaves de manteau rapportées à la surface par les
volcans montrent que dans les 200 premiers Km celui-ci est soumis à des
changements de phases qui ne concernent que la phase alumineuse. On observe
successivement :
1 - les péridotites à
plagioclase dans les 30
premiers Km;
2 - les péridotites à
spinelle entre 30 et
3 - les péridotites à grenat
au-delà de
La conservation de la masse implique que dans ces
transformations, la phase alumineuse n’est pas seule concernée, et ces
transformations modifient les proportions des autres minéraux, olivine et
pyroxènes, mais qui restent stables. A plus grande profondeur, la sismique nous
enseigne que le manteau supérieur est encore le lieu de plusieurs changements de phases qui intéressent
cette fois la phase minérale majeure du manteau, l'olivine (Fig. 10).Elle
passe tout d'abord de la symétrie orthorhombique peu dense au système cubique
plus dense. Cette structure de l'olivine est dite « spinelle » proche
de celle du minéral spinelle, cubique lui aussi. Dans ces deux structures de
l'olivine, orthorhombique et cubique, le Silicium occupe un site tétraédrique,
où chaque atome de silicium est entouré par 4 oxygènes. Vers
Le manteau inférieur apparaissait jusqu'à
récemment comme très homogène, à l'instar de l'augmentation très lente de la
densité et de la vitesse des ondes, qui atteignent respectivement,
difficilement 6 pour la densité, et 6.6 km/s pour la vitesse des ondes S, au
voisinage de la discontinuité de Gutenberg (Fig. 10). Il faut remarquer
que les discontinuités qui marquent le manteau ne sont pas comparables à la
discontinuité entre noyau et manteau où le saut de densité est supérieur au
saut océan-lithosphère, et où le contraste des viscosités est sans doute
« comparable » à celui de l'interface océan-lithosphère.
2
- Fusion partielle du manteau
a - Le manteau en
quelques paramètres intensifs
On sait ainsi que le Manteau supérieur est un solide, nommé
péridotite, constitué de
4 phases solides majeures :
Olivine
ol
Orthopyroxène
opx
Clinopyroxène cpx
plus une phase
alumineuse:
* Plagioclase plg
Spinelle sp
Grenat gt.
Lorsque
ces 4 phases sont présentes, la péridotite porte le nom de lherzolite.
On
sait aussi que la composition chimique du manteau supérieur reste à peu près
constante, quelque soit l’assemblage des phases qui le constituent. Les
principaux constituants chimiques du manteau sont des oxydes, SiO2, MgO, FeO, CaO et Al2O3,
qui entre dans les phases solides, silicates et spinelle. H2O est aussi un constituant de système mantellique,
mais son abondance très faible, de l’ordre de 0.1%, justifie que l’on néglige
ici les phases minérales hydratées (contenant des groupements OH, e.g. phlogopite).
Les
trois phases minérales non alumineuses seront toujours présentes, mais leurs
abondances relatives varieront avec la profondeur, en relation avec la phase
alumineuse présente. Ainsi:
1) lorsque 1 mole de plagioclase disparaît au profit d’1 mole
de spinelle créé on a:
2 SiO2 1 Al2O3 1CaO libérés
1 Al2O3 1 MgO consommés
Le bilan apparaît donc
équilibré en Al2O3, et le MgO provient de la transformation d’une olivine en
pyroxènes, et l’on doit écrire la relation suivante
1
Plg + 2Ol = 1 Sp + 1 Cpx + 1 Opx; (1)
2) lorsque le spinelle disparaît au profit du grenat on a:
1 Al2O3 1 MgO libérés
3 SiO2 1 Al2O3 3 MgO consommés
Le bilan apparaît donc
encore équilibré en Al2O3, etSiO2 et MgO proviennent cette fois de
l’orthopyroxène, et l’on doit écrire la relation suivante
1
Sp + 2 Opx = 1 Gt + 1 Ol (2)
2 -
paramètres externes, P & T, et La
fusion partielle du Manteau
Les
changements de phases décrits précédemment par relations (1) et (2), ont un DV
<0 de la gauche vers la droite. Ils expriment la réponse du solide
mantellique à l’augmentation de pression avec la profondeur. Par ailleurs, en
dehors de l'eau qui est un corps aux propriétés physiques éminemment
particulières, le passage de l'état solide à l'état liquide des matériaux
terrestres se fait à DV croissant (La pression "favorise" le solide).
Dans un champ P, T, le liquidus et le solidus anhydres du Manteau terrestre,
connus expérimentalement, ont donc une pente positive. Le choix du solidus anhydre
est justifié par la très faible quantité d’eau contenue dans le manteau.
On
appelle géotherme la relation température profondeur(courbe P. T.). Si celle-ci
était linéaire, c’est à dire si l'augmentation de température avec la
profondeur était constante, et restait égale à la variation mesurée au
voisinage de la surface terrestre[1], le point de fusion du
manteau serait très rapidement dépassé. Le manteau serait entièrement fondu au
delà de
1 - en premier lieu, la lithosphère terrestre rigide (croûte +
sommet du manteau) ne transfert la chaleur que par conduction[2], alors que le manteau plus
profond est un solide “fluide” qui transporte la chaleur aussi par convection;
le gradient de température, fort dans la lithosphère, s’affaiblit donc
rapidement en entrant dans le manteau convectif ;
2 - en second lieu,
l'essentiel de la chaleur terrestre est produite par Radio Activité, et ce de
façon hétérogène; la majeure partie des éléments à vie longue, U, Th, K sont
concentrés dans la croûte terrestre ce qui ne peut que renforcer la courbure du
gradient thermique.
Depuis
4.5 Ga., les volcans terrestres déversent à la surface des dizaines de km3 de
lave / an. Si ce liquide est extrait du manteau par fusion partielle, on voit
mal dans ce qui précède comment le solide mantellique peut être capable de
produire des liquides magmatiques! Produire du liquide impose donc une
alternative :
1 - soit déplacer le
géotherme terrestre jusqu'à recouper le solidus du manteau ;
2 - soit déplacer le solidus
du manteau jusqu'à atteindre le géotherme....
Comment
pouvons nous agir sur les paramètres de système pour faire se recouper solidus
et géotherme?
1 - -Déplacer le géotherme
signifie augmenter la T° à une pression donnée, donc disposer de plus de
chaleur que ce dont le solide à l'équilibre dispose normalement. Ce
déséquilibre doit apparaître grâce au comportement de fluide convectif du
manteau à l'échelle géologique, dont la dérive des continents est la
manifestation en surface. Si la vitesse de convection est suffisamment lente,
le solide ascendant mantellique dans une cellule convective aura le temps
"d’ajuster" son état aux conditions environnantes, mais si la vitesse
de convection est suffisante pour que la diffusion de la chaleur avec
l'environnement ne soit pas complète, on se rapproche des conditions d'une détente
adiabatique (sans échange de chaleur). Si une parcelle de manteau s’élève dans
les conditions considérées, elle sera alors anormalement chaude et tendra à
remonter vers la surface, et cela d’autant plus vite que la différence de
densité avec le manteau environnant sera grande. Le géotherme se trouve alors
déplacé vers les hautes températures. La fusion commencera lorsque la parcelle
de Manteau arrivera à une profondeur suffisamment faible, et elle sera d’autant
plus intense que l’intersection du géotherme et du solidus sera importante. La
décompression adiabatique caractérise les ascendants mantelliques (au droit des
rides océaniques par exemple) qui constituent des lieux majeurs de production
de magma. Nous y reviendrons dans la description de la lithosphère océanique.
2 - Déplacer le solidus jusqu’à recouper le
géotherme impose de modifier au moins 1 des paramètres intensifs qui décrivent
le système mantellique. Le constituant H2O est le paramètre influent
essentiel, même si sa concentration dans le système est basse. En effet, la
pression partielle d'H2O peut modifier très fortement la position du
solidus. On remarque sur la figure 12 la morphologie du solidus humide, très
incurvé vers les basses pressions (flèche 2). Mais pour ce faire, il faut
pouvoir justifier une introduction d'eau dans le système. Inversement, si l'on
y parvient, la fusion partielle est assurée. Nous y reviendrons dans la
description de la lithosphère plongeante.
La géochimie
affirme reconnaître deux réservoirs parents distincts dans les produits du
volcanisme:
1 - Le premier correspond
aux basaltes d'origine profonde. Ceux-ci montrent des rapports isotopiques
proches de ceux des chondrites (que l'on considère comme un matériel non
différencié n'ayant subi aucune ségrégation). Le manteau profond qui donne naissance à ce type de basaltes n'aurait
donc pas subi d'autre fractionnement que celui qui a séparé le noyau du
manteau lors de la constitution du globe. Son caractère primitif n'aurait pas
été considérablement modifié depuis. Des études récentes des rapports
isotopiques de l'hélium, élément volatil et donc prompt à se séparer du manteau
pour rejoindre l’atmosphère[3] montrent aussi que le
rapport 3He/4He est anormalement élevé dans ces roches
volcaniques d'origine profonde. Ce rapport apparaît proche de ce qu’il devait
être au début de l’histoire de la Terre et il n’aurait que très peu évolué lui
aussi depuis plusieurs Ga. Inversement certains caractères chimiques
particuliers de ce volcanisme, qui par exemple s’apparentent à un mélange avec
des matériaux sédimentaires, supposent que ce réservoir n'est pas complètement
isolé de la surface.
2 - Le second type
correspond aux basaltes d'origine mantellique plus superficielle. Leur
composition élémentaire et leurs rapports isotopiques sont très différents des
premiers et suggèrent que le manteau
superficiel dont ils sont issus a subi une histoire beaucoup plus mouvementée,
passant en particulier par le fractionnement de la croûte continentale. De
densité considérablement plus faible que celle du manteau supérieur, elle est
donc très peu recyclée depuis sa fabrication. Si l'on considère que la croûte
terrestre est le produit de la différenciation chimique du manteau, la partie
du manteau qui a donné naissance à la croûte doit être corrélativement appauvrie
en éléments qui sont préférentiellement incorporés dans la croûte. Cette
soustraction a sans doute marqué à jamais la composition du manteau supérieur.
Une telle dichotomie des produits volcaniques tend
naturellement à laisser imaginer que ces deux réservoirs, si différents, ont
vécu indépendamment. Dans ces conditions, la discontinuité à
3 - La tomographie
sismique du manteau supérieur
La tomographie sismique est probablement le moyen
d'investigation du manteau le plus puissant dont nous disposons de nos jours.
Il s'agit d'une méthode d'analyse des données sismiques enregistrées par un
réseau serré de sismographes. Nous avons vu au paragraphe
“ sismique ” que l'inversion consiste ici à fabriquer un modèle de
Terre sphéro-concentrique radialement homogène, dont nombre de paramètres ne
sont pas directement mesurables (profondeur des discontinuités, T°, P, K, m, r...),
mais pour lesquels les valeurs attribuées satisfont au mieux les données
mesurées en surface (temps de trajet des ondes en particulier). La tomographie
donne, après inversion, une image du manteau à une profondeur donnée en mettant
en évidence des variations latérales des vitesses de transmission des ondes
sismiques à la profondeur considérée, par rapport à la moyenne prévue par le
modèle.
Elle
met ainsi en évidence dans le manteau
supérieur profond (Fig. 13) des zones
plus rapides (en bleue) et des zones plus lentes (en rouge) qui sont
attribuées à des écarts de T° caractérisant des mouvements convectifs
évidemment transverses sur les discontinuités liées aux changements de phases
préalablement évoquées.
Les cartes des vitesses
à profondeur croissante de la figure 13 montrent une très bonne corrélation entre la position des régions lentes et chaudes en profondeur
(rouge foncé) et la présence des dorsales océaniques en surface, qui sont les zones où les plaques lithosphériques sont
fabriquées en continu à partir du manteau, par accrétion de lithosphère. La
zone chaude correspondant à la ride Est et Sud Pacifique reste marquée jusqu'à
Les petites ouvertures
récentes, comme la mer du Japon, correspondent à une anomalie thermique peu ou
pas marquée en profondeur.
Les
cartes de la figure 13 montrent que les régions
rapides et froides du manteau correspondent, en surface, en premier lieu
aux masses continentales, et en
second lieu à la zone centrale de la
plaque Pacifique. On remarquera que la zone froide centrée sur la plaque
Pacifique perd progressivement son identité en descendant.
Seules
les zones de subduction présentent des racines froides profondes. Certes le
réchauffement des plaques subductées lors de l'enfouissement efface
progressivement le contraste de densité avec le manteau environnant, mais leur signature sismique a pu être mise en évidence malgré tout jusqu'à la
transition à
Si les rides sont le lieu d'âge zéro de la lithosphère, les
fosses (zones de subduction) ne constituent pas un lieu isochrone. Le lieu de
plongement d'une plaque résulte en effet d'un ensemble de paramètres qui n’ont
rien à voir avec l’âge de la plaque en ce lieu, mais bien plutôt avec la nature
et la géométrie des plaques en contact avec elle :
1 - Leur nature intervient en effet car il existe un seuil de
densité en dessous duquel les matériaux sont trop légers pour suivre une
branche convective descendante dans le manteau. Ainsi, les continents (densité
moyenne 2.7) ne peuvent être que très partiellement recyclés, nous en
reparlerons. Leur présence impose alors à une plaque voisine de plonger à leur
contact.
2 - La distribution
(géométrie) des masses non recyclables joue aussi un rôle prépondérant, car la
Terre est une surface fermée; tout mouvement en un point a donc des incidences
ailleurs. On l'oublie trop souvent à regarder des projections planes.
Une coupe à travers une zone de subduction, comme par exemple
le NE de l’arc volcanique du Japon (Fig. 16) montre que les foyers des
séismes (petits ronds) sont répartis sur trois régions:
1 - Du côté de la fosse
océanique, les séismes sont localisés à la partie moyenne et supérieure de la
région froide (en bleu sombre) identifiée comme l’extrados de la plaque
Pacifique plongeant sous le Japon. Cette trace sismique est appelée plan de Benioff. Il est à noter que le
coin de manteau situé au-dessus de la plaque plongeante est constitué de deux
régions : le manteau en contact avec la plaque plongeante est refroidi par
celle-ci ; cette région est surmontée par une région chaude (jaune à
rouge) en relation étroite avec le volcanisme en surface.
2 - En sub-surface sous le
Japon, les séismes en grand nombre témoignent de l'activité volcanique dans la
croûte continentale de l'arc.
3 - Du côté de la mer du
Japon, on observe beaucoup de foyers sismiques peu profonds. Ceux-ci sont
provoqués par la mise en place plus à l’ouest de petites cellules de convection
dans le coin mantellique situé entre la plaque plongeante et la lithosphère
(Japon + mer du Japon). Cette “ mini ” convection provoque dans cette
lithosphère une distension très comparable à celle que l'on observe au droit
des dorsales océaniques majeures. On appelle ces régions d'ouvertures
océaniques mineures des bassins
arrière-arc. Ces zones chaudes du manteau sous les petites mers arrière-arc
disparaissent rapidement en profondeur dans le manteau.
Le comportement du plan
de Benioff est différent d'une zone de subduction à une autre. Son angle de
plongement varie considérablement (Fig. 17). Les zones de Benioff
plongeant vers l’E-NE sont à faible pendage et supportent des chaînes
orogéniques à double vergence alors que celles plongeant vers l’Ouest sont à
forte pente et les chaînes associées sont à simple vergence. C.
Doglioni 1999 voit dans cette différence un mouvement relatif d'est en ouest du manteau profond par rapport à celui
des plaques lithosphériques, provoqué par la rotation terrestre.
Le
plus souvent, la plaque subductée vient s’étaler sur la zone de transition à
1)
un nouveau changement de phase ;
2)
une hétérogénéité chimique dans le manteau inférieur ;
3)
plus probablement cette discontinuité correspond à la base de la plaque
subductée, stockée à une profondeur pouvant atteindre ainsi 800 à
4 - La tomographie sismique du manteau
inférieur
Nous avons déjà mis en
évidence le caractère hétérogène de la couche D" à la base du manteau
(frontière noyau-manteau) et, en corollaire, l’existence d’anomalies thermiques
liées au mode de transfert de la chaleur du noyau vers le manteau. Les cartes
tomographiques obtenues ces dernières années pour diverses profondeurs dans le
manteau inférieur (e.g. Michael Gurnis et al, 2000,
Fig. 18) nous montrent que le contraste de densité définit deux zones
chaudes équatoriales au voisinage du noyau. Ce contraste tend à s’effacer dans
la partie médiane du manteau. On remarque en effet qu'à cette profondeur deux
« tuyaux » beaucoup plus étroits (en rouge) correspondent aux deux
zones chaudes de la couche D". On remarque sur la figure que le tuyau
mantellique africain se situe à l'aplomb du plateau sud-africain. Ce haut
plateau est anormalement élevé pour un vieux craton complètement érodé (environ
1000-1200m au lieu de 300-400m en moyenne). Pour Michael Gurnis et son équipe,
la dilatation provoquée par le matériel mantellique chaud serait à l’origine de
soulèvements régionaux de grande ampleur. Ainsi la topographie de la planète
serait largement marquée par la convection mantellique profonde. Le second
conduit surchauffé, situé sous le Pacifique, correspondrait aux panaches
équatoriaux qui percent en surface le plancher océanique (e.g. volcanisme
d’Hawaï).
Dans les interprétations
construites à partir de l’ensemble des données (Fig. 19), les auteurs
montrent sur les coupes B et C que le matériel chaud qui remonte ne dépasse pas
la discontinuité à
Il apparaît ainsi que la discontinuité à
5 - Vers une convection à 1 ou 2 couches
Pour
les géochimistes, la question est en effet encore largement d’actualité. Nous
avons vu que la dichotomie de composition chimique entre volcanisme d’origine
profonde et volcanisme d’origine plus superficielle paraît nécessiter une
séparation ancienne (plusieurs Ga.) en deux réservoirs mantelliques distincts,
l'un supérieur et l'autre inférieur. La discontinuité à
Pour
les géophysiciens, cette séparation n’est pas évidente et les opinions sont
encore tranchées. Certains comme Glatzmaier et Roberts estiment que les modèles
à une seule couche de convection, comme Terra-Dynamo (Fig. 20a),
« collent » mieux aux données sismiques que les modèles à deux
couches.
Deux observations clefs
doivent être conservées en mémoire :
1-
Nous avons vu que la forme du géoïde est dominée par des
structures de grande longueur d’onde, 10 000 à 20 000 kms, qui sont
considérablement plus grandes que la hauteur possible des cellules convectives
du manteau (moins de
2-
Les hétérogénéités de vitesses sismiques mesurées dans le
manteau sont elles aussi de grande longueur d’onde
Ces
deux faits sont en contradiction avec les résultats des modèles de manteau iso
visqueux, qui montrent des cellules convectives aussi peu larges que hautes
(Fig. 20b). Par contre les modèles de manteau à viscosité croissante
(Fig. 20c) présentent des cellules étalées beaucoup plus conformes aux
structures gravifiques et sismiques évoquées. En plus, les branches plongeantes
des cellules acquièrent une morphologie en feuillets plus comparables aux
plaques plongeantes que les panaches froids plongeants des modèles isovisqueux.
Outre le chauffage interne du manteau par radioactivité et son chauffage basal
hétérogène (et mal connu) par la couche D”, il existe de nombreux autres
paramètres qui peuvent modifier la convection, rappelons le comportement
cassant de la lithosphère continentale qui vient localement jouer le rôle de
couvercle, la viscosité qui peut varier brutalement, les changements de phases
qui accompagnent l’augmentation de pression avec la profondeur. Confortant ce
point de vue, on a mis en évidence pour la première fois dans les années 90
dans l’Ouest Pacifique sous la fosse des Kouriles et sous le Japon, des zones
froides dans le manteau inférieur qui paraissent relier zone de subduction dans
le manteau supérieur et couche D".
Les simulations, effectuées depuis les années (1997-1998) à
partir des résultats de la tomographie viennent conforter cette hypothèse. La
figure 21 montre par exemple l’iso-surface limitant le domaine des ondes P à
vitesse 0.5% plus grande que la moyenne, pour tout le manteau (supérieur et
inférieur) de la région allant du Japon à l’Est de
Ainsi donc, des exemples de plus en plus nombreux de plaques
modernes et anciennes plongeant dans le manteau inférieur sont rapportés. Ces
plaques vont rejoindre la couche D", qui apparaît d’une part, ainsi qu’on
l’a montré plus avant, comme le parent des ascendants mantelliques profonds
(les panaches), et d’autre part comme le cimetière des plaques océaniques
subductées.
Il est toutefois très probable que les descendants
mantelliques ne franchissent pas aisément la discontinuité à
On
sait que le contraste entre les deux réservoirs résulte principalement de la
transformation de phase,
olivine
«. pérovskite +
magnésio-wüstite.
Aussi,
dès 1994, on a cherché comment la transition de phase à
En
résumé :
1 - La trace froide de la
plaque subductée peut être suivie jusqu'à 650-
2 - L'angle de plongement de
la plaque est souvent brutalement modifié à cette profondeur, témoignant ainsi
de la « flottabilité » importante de cette plaque sur le manteau
inférieur ; La zone de transition constitue donc bien une couche limite
(conductive et donc à fort gradient thermique) ;
3 - Le déplacement de l'équilibre de phase initial, résultant de cette
accumulation de matériau froid et dense pourrait permettre un changement de la
pente de l’équilibre, déclenchant une
avalanche de matériau lithosphérique (plaque subductée) dans le manteau
inférieur suivie d'un retour à la normale ; le rôle de couche limite
de la zone de transition est donc transgressé au moins localement, et la
convection mantellique, certes à deux couches, admet des discontinuités de
cette couche limite, dans le temps et/ou dans l’espace ;
4 - La couche D"
constituerait le cimetière de ces plaques subductées, matériau hétérogène
mélange de manteau lithosphérique appauvri et réfractaire, et de matériau
crustal relativement enrichi en éléments alcalin et hygromagmatophiles[4] ; elle
s’enrichirait en outre des produits de réaction entre la base du manteau et le
noyau métallique liquide ;
5 - Les hétérogénéités de la
couche D", en agissant sur le transfert de chaleur du noyau vers le
manteau, régiraient le fonctionnement de la dynamo terrestre et la dynamique
des panaches mantelliques profonds générateurs d’épisodes volcaniques
paroxysmiques ;
6 - Le transfert des
panaches chauds du manteau inférieur au manteau supérieur est complexe; une
partie seulement du matériel du panache est transférée vers le manteau
supérieur; cette partie semble entraînée dans la convection mantellique
supérieure (au moins dans le cas de l’Afrique). En surface, le volcanisme des
points chauds reste géographiquement fixe sur de longues périodes alors que les
plaques sont mobiles, dessinant ainsi par exemple les chaînes de volcans d'âge
régulièrement croissant du Pacifique. Un tel schéma suggère que la géométrie
des cellules convectives du manteau supérieur reste stable au moins pendant le
même laps de temps ; la géométrie de ces cellules est alors indépendante
de celle des plaques sus-jacentes, sauf dans les branches descendantes qui,
pour certaines, coïncident nécessairement avec les zones de subduction.
La théorie des plaques lithosphériques ne nous dit rien de la
convection mantellique profonde. Les
basaltes échantillonnés en surface peuvent contenir des fragments du manteau,
dont ils sont issus par fusion partielle (cf. poly TP axe GP cristallisation
fractionnée). Le manteau terrestre nous est aussi accessible directement le
long de certaines failles transformantes océaniques à très fort rejet, comme la
fracture de Vema dans l’atlantique, et de manière à peine moins directe dans
les ophiolites. Ces dernières sont des pans entiers de dorsale ou de plancher
océanique, qui sont venus s’échouer après un épisode tectonique majeur sur la
bordure des continents.
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( Valse à 3 temps )
plan
[1] de l’ordre de 30°/Km en moyenne et pouvant dépasser
100°/Km dans les rifts.
[2] exception faite du transport de chaleur par advection dans
les zones de rift et de subduction (chapitre 1 et § suivants).
[3] et ce d’autant plus
qu’il s’agit d’un isotope léger (cf. § VI).
[4] On appelle élément hygromagmatophile tout élément qui,
engagé ans un processus de fusion partielle du manteau ou de la croûte,
présente un coefficient de partage D entre le solide et le liquide très
faible : D<<1. Autrement dit, ces élément présentent une grande
affinité (comme les alcalins dans la fusion du manteau) pour les liquides
magmatiques. Donc lors de la cristallisation fractionnée les éléments
hygromagmatophiles se concentrent dans les derniers liquides.